Le Grand Espoir- 3e édition

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20 - Un grand réveil religieux

La prophétie du message du premier ange, dans le quatorzième chapitre de l’Apocalypse, annonce un grand réveil religieux à l’occasion de la proclamation du proche avènement du Christ. Elle nous montre un ange « qui volait au milieu du ciel; il avait une bonne nouvelle éternelle à annoncer aux habitants de la terre, à toute nation, tribu, langue et peuple. Il disait d’une voix forte : Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue, et prosternez-vous devant celui qui a fait le ciel, la terre, la mer et les sources d’eau 1 !” GE3 261.1

Le fait qu’un ange soit le héraut de cet avertissement est significatif. Par la pureté, la gloire et la puissance de ce messager céleste, Dieu, dans sa sagesse, a trouvé bon de représenter le caractère noble de l’œuvre que devait accomplir ce message, et également la puissance et la gloire qui devaient l’accompagner. Le vol de tel ange « au milieu du ciel », la «voix forte” avec laquelle il prononce cet avertissement, et la proclamation de celui-ci à tous les «habitants de la terre, à toute nation, tribu, langue et peuple» témoignent de la rapidité et de l’universalité de te mouvement.2 GE3 261.2

Ce message lui-même jette un flot de lumière sur l’époque où ce mouvement devait avoir lieu. Il nous est dit que celui-ci fait partie de la « bonne nouvelle éternelle” et qu’il annonce l’ouverture du jugement. Le message du salut a été prêt hé dans tous les siècles; mais celui-ci constitue une partie de l’Évangile qui ne pouvait être proclamée que dans les derniers jours, car ce n’est qu’à ce moment qu’on pourrait dire avec véracité que «l’heure de son jugement est venue”. Les prophéties nous présentent une succession d’événements qui aboutissent à l’ouverture du jugement. C’est particulièrement le cas du livre de Daniel. Mais ce prophète reçut l’ordre de tenir «secrètes, scellées, jusqu’au temps de la fin les parties de sa prophétie relatives aux derniers jours. Ce n’est qu’à partir de cette époque qu’un message concernant le jugement pourra être proclamé, reposant sur l’accomplissement de ces prophéties. En effet, au temps de la fin, nous dit le prophète, «une multitude alors cherchera, et la connaissance augmentera 3». GE3 261.3

L’apôtre Paul avait averti l’Église de ne pas espérer l’avènement du Christ à son époque : « Il faut d’abord que vienne l’apostasie et que se révèle la personnification du mal’.4” Ce n’est qu’après cette grande apostasie et la longue période de domination du «Sans-lois 5” qu’on doit être attentif à cet avènement. Ce « Sans-loi ”, appelé aussi « le mystère du mal 6 ”, « celui qui est voué à la perdition 7 », « l’adversaire 8 ”, représente la papauté, qui, selon la prophétie, devait exercer sa suprématie pendant 1260 années. Cette période prit fin en 1798. Le retour du Christ ne pouvait pas avoir lieu avant cette date. Paul embrasse, par cet avertissement, la totalité de la dispensation chrétienne jusqu’à l’année 1798. C’est seulement après cette date que le message du second avènement du Christ devait être proclamé. GE3 261.4

Aucun message de ce genre n’a jamais été annoncé dans les siècles passés. Paul, comme nous venons de le voir, ne l’a pas prêché; il a dirigé l’attention de ses frères vers un avenir encore lointain pour l’avènement du Seigneur. Les Réformateurs ne l’ont pas proclamé non plus. Martin Luther situait le jugement dans l’avenir, environ 300 ans après son époque. Mais, depuis 1798, le livre de Daniel a été « descellé», la connaissance des prophéties a augmenté et de nombreuses personnes ont proclamé le message solennel d’un jugement proche. GE3 262.1

Comme la grande Réforme du XVIe siècle, le mouvement du second avènement apparut simultanément dans différents pays de la chrétienté. Én Europe comme en Amérique, des hommes de foi et de prière furent amenés à étudier les prophéties. Én remontant le cours de l’Histoire inspirée, ils découvrirent des preuves évidentes que la fin de toutes choses était proche. Dans divers pays se formèrent des groupes isolés de chrétiens qui, uniquement par l’étude des Écritures, parvinrent à la conviction de la proximité du retour de Jésus. GE3 262.2

En 1821, trois ans après que William Miller fut arrivé à son interprétation des prophéties annonçant l’époque du jugement, le D’ Joseph Wolff, «le missionnaire pour le monde », commença à proclamer le proche avènement du Seigneur. Il était né en Allemagne, de parents juifs. Son père était rabbin. Très jeune, il fut convaincu de la véracité de la religion chrétienne. Doué d’un esprit actif et curieux, il avait écouté avec attention les conversations qui avaient lieu chez son père, où de pieux Israélites s’assemblaient chaque jour pour s’entretenir des espérances et des attentes de leur peuple, de la gloire du Messie à venir et de la restauration d’Israël. Un jour, entendant parler de Jésus de Nazareth, le jeune garçon demanda qui était et homme. « Un Juif du plus grand talent, lui répondit-on. Mais, comme il prétendait être le Messie, il fut condamné à mort par le tribunal juif. » « Pourquoi, reprit le jeune garçon, Jérusalem est-elle détruite, et pourquoi sommes-nous en captivité ? » « Hélas, répondit son père, c’est parce que les Juifs ont mis à mort les prophètes. » L’idée traversa aussitôt l’esprit de l’enfant : «Jésus était peut-être aussi prophète, et les Juifs l’ont mis à mort alors qu’il était innocent 9. » Ce sentiment était si fort que, bien qu’il lui soit interdit de pénétrer dans une église chrétienne, il s’attardait souvent à l’extérieur pour écouter les prédications. GE3 262.3

Âgé seulement de sept ans, comme il parlait avec fierté devant un voisin, un chrétien âgé, du futur triomphe d’Israël au moment de la venue du Messie, le vieil homme lui dit avec douceur: «Mon cher enfant, je vais te dire qui est le vrai Messie : c’est Jésus de Nazareth, [...] que tes ancêtres ont crucifié, exactement comme ils ont mis à mort les prophètes d’autrefois. Rentre chez toi et lis le chapitre 53 du livre d’Ésaïe, et tu seras convaincu que Jésus-Christ est le Fils de Dieu 10. » La conviction s’empara aussitôt de lui. Il rentra chez lui et lut le texte biblique indiqué, s’émerveillant de voir avec quelle perfection la prophétie s’était accomplie en Jésus de Nazareth. Les paroles de ce chrétien étaient-elles fondées ? Le jeune garçon demanda à son père une explication de ce chapitre, mais sa demande se heurta à un silence si glacial que plus jamais il n’osa mentionner ce sujet. Cet incident, cependant, ne fit qu’augmenter son désir d’en savoir plus sur la religion chrétienne. GE3 262.4

La connaissance qu’il recherchait lui fut délibérément refusée dans son foyer juif. Lorsqu’il fut âgé de onze ans, il quitta la maison paternelle et partit dans le monde pour faire ses études, choisir sa religion et sa profession. Il logea pendant quelque temps chez des membres de sa famille, mais en fut bientôt chassé comme apostat. Seul et sans un sou, il dut se frayer un chemin parmi des étrangers. Il alla de lieu en lieu, étudiant avec application et gagnant sa vie en donnant des cours d’hébreu. GE3 263.1

Sous l’influence d’un instructeur catholique, il embrassa la foi de l’Église romaine, et conçut le dessein de devenir missionnaire auprès des siens. C’est dans ce but qu’il se rendit, quelques années plus tard, à la société pour la propagation de la foi à Rome. Là, son esprit indépendant et sa liberté de parole le firent soupçonner d’hérésie. Il attaquait ouvertement les abus de l’Église et préconisait la nécessité d’une réforme. Bien que les dignitaires papaux l’aient traité au début avec une faveur spéciale, on l’éloigna de Rome au bout d’un certain temps. Sous la surveillance de l’Église, il alla de lieu en lieu, jusqu’à ce que son insoumission à l’Église romaine devienne évidente. On le déclara incorrigible et on le laissa aller à sa guise. Il se rendit alors en Angleterre, où, embrassant la foi protestante, il se joignit à la communauté de l’Église d’Angleterre. Après deux ans d’études, il se lança dans sa mission en 1821. GE3 263.2

En acceptant la grande vérité concernant la première venue du Christ comme «homme de douleur et habitué à la souffrance 11», Joseph Wolff se rendit compte que les prophéties annoncent avec tout autant de clarté le second avènement «avec beaucoup de puissance et de gloire 12 ». Il s’efforça d’amener les membres de son peuple à Jésus de Nazareth, le Messie promis, en attirant leur attention sur sa première venue, dans l’humilité et comme sacrifice pour les péchés des hommes. Il leur enseigna aussi son second avènement comme Roi et Libérateur. GE3 263.3

«Jésus de Nazareth, le véritable Messie, disait-il, celui dont les mains et les pieds ont été percés, qui a été comme un “mouton qu’on mène à l’abattoir 13 », « l’homme de douleur et habitué à la souffrance 14 ”, qui, après que le sceptre eut été retiré à Juda 15, est venu une première fois, viendra une seconde fois “sur les nuées du ciel 16” avec la trompette de l’Archange 17. » « Il se tiendra sur le mont des Oliviers ; et cette domination, autrefois confiée à Adam sur toute la création 18, et qu’il a perdue’, lui sera donnée. Il sera le Roi de toute la terre. Les soupirs et les lamentations de la création cesseront, et des chants de louange et d’actions de grâce se feront entendre. [...] Lorsque Jésus viendra “dans la gloire du Père et des saints anges 20 ”, [...] les croyants morts ressusciteront en premier 21. C’est ce que, nous, chrétiens, appelons “la première résurrection 22 “. Puis, le règne animal sera transformé dans sa nature 23 et lui sera soumis 24. La paix universelle régnera partout 25.” «Le Seigneur contemplera de nouveau la terre et dira: “C’ [est] très bon 26”. » GE3 263.4

Joseph Wolff croyait que l’avènement du Seigneur était proche ; son interprétation des périodes prophétiques plaçait l’accomplissement de ce retour à quelques années de distance de la date déterminée par William Miller. À ceux qui lui citaient le texte «pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît 27 », disant que les hommes ne peuvent connaître la proximité du second avènement, il répondait: «Notre Seigneur a-t-il dit que ce jour et cette heure ne seraient jamais connus? Ne nous a-t-il pas donné les signes des temps pour que nous puissions connaître au moins l’approche de son avènement, de même qu’on connaît l’approche de l’été par le figuier qui se couvre de feuilles 28 ? Ne devrons-nous jamais connaître cette période, alors qu’il nous exhorte lui-même non seulement à lire le livre du prophète Daniel, mais aussi à le comprendre 29? Ce même prophète nous dit que ses paroles sont scellées “jusqu’au temps de la fin” (ce qui était le cas à son époque), qu’ “une multitude alors cherchera” (expression hébraïque signifiant observer le temps et y réfléchir) et que “la connaissance [concernant cette époque] augmentera 30”. En outre, notre Seigneur n’avait pas l’intention de dire par ces paroles qu’on ne connaîtrait pas l’approche de cette époque, mais que ce sont le jour et l’heure exacts que personne ne connaît. On en saura suffisamment par les signes des temps, nous dit-il en réalité, pour nous amener à nous préparer pour son avènement, de même que Noé prépara l’arche en prévision du Déluge 31. ” GE3 264.1

Concernant le système populaire d’interprétation des Écritures, système plutôt erroné, Joseph Wolff écrivit: «La plus grande partie de l’Église chrétienne s’est détournée du sens évident de l’Écriture au profit du système spiritualisant des bouddhistes, qui croient que le bonheur futur de l’humanité consistera à planer dans les airs. Elle suppose que lorsqu’on lit Juifs, il faut comprendre païens; que lorsqu’on parle de Jérusalem, il faut entendre l’ Église; que lorsqu’il est dit terre, cela signifie ciel; quant à l’avènement du Seigneur, il faut comprendre les progrès des sociétés missionnaires; et que monter à la Montagne de la Maison du Seigneur signifie sous-entend tenir une grande assemblée méthodiste 32. » GE3 264.2

Pendant les vingt-quatre années comprises entre 1821 et 1845, Joseph Wolff voyagea énormément: en Afrique, où il visita l’Égypte et l’Abyssinie; en Asie, où il traversa la Palestine, la Syrie, la Perse, Boukhara et l’Inde. Il alla aussi aux États-Unis. Il s’y rendit par bateau, en faisant escale et prêchant sur l’île de Sainte-Hélène. Il arriva à New York en août 1837 ; et, après avoir proclamé la Parole dans cette ville, ainsi qu’à Philadelphie et à Baltimore, il arriva finalement à Washington. Là, raconte-t-il, « sur la proposition de l’ex-président John Quincy Adams à l’une des chambres du Congrès, on m’accorda unanimement l’utilisation de la Salle du Congrès pour une conférence, que je fis un samedi. Je fus honoré par la présence de tous les membres de cette assemblée, ainsi que par celle de l’évêque de la Virginie, du clergé et de nombreux citoyens de Washington. Le même honneur me fut accordé par les membres du gouvernement du New Jersey et de la Pennsylvanie, en présence desquels je donnai des conférences sur mes recherches en Asie, ainsi que sur le règne personnel de Jésus-Christ 33. » GE3 265.1

Le Dr Wolff voyagea aussi dans les pays les plus barbares, sans aucune protection des autorités européennes, subissant de nombreuses épreuves et entouré de périls sans nombre. Il fut roué de coups et affamé, vendu comme esclave et condamné à mort trois fois. Il fut attaqué par des voleurs et faillit parfois mourir de soif. Un jour, il fut dépouillé de tout ce qu’il possédait et dut parcourir à pied des centaines de kilomètres à travers les montagnes, la neige fouettant son visage et ses pieds nus engourdis au contact du sol gelé. GE3 265.2

Lorsqu’on lui déconseillait de voyager sans armes parmi les tribus sauvages et hostiles, il se déclarait « bien armé: la prière, le zèle pour le Christ et la confiance en son aide. [...] J’ai aussi l’amour de Dieu et de mon prochain dans le cœur , et la Bible à la main 34.” Il transportait partout avec lui sa Bible en hébreu et en anglais. De l’un de ses plus récents voyages, il raconta: «Je [...] gardais la Bible ouverte à la main. J’avais le sentiment que ma force résidait dans ce Livre, et qu’il avait le pouvoir de me soutenir 35. ” GE3 265.3

Il poursuivit ainsi ses travaux jusqu’à ce que le message du jugement ait été porté à une grande partie de la terre habitée. Parmi les Juifs, les Turcs, les Perses, les Hindous et les nombreuses autres nationalités et races, il diffusa la Parole de Dieu dans leurs langues respectives, et, partout, il annonça l’approche du règne du Messie. GE3 265.4

Au cours de ses voyages à Boukhara, il découvrit un peuple éloigné et isolé qui professait la doctrine du proche avènement du Seigneur. Les Arabes du Yémen, raconte-t-il, « possèdent un livre appelé Seera, qui annonce le second avènement du Christ et son règne en gloire; ils attendent de grands événements pour l’année 184036 ». «Au Yémen, [...] je passai six jours avec les Rékabites. Ils ne boivent pas de vin, ni ne plantent de vignes ; ils ne sèment aucune graines et vivent sous la tente, en souvenir du bon vieux Jonadab, fils de Rékab 37. Je découvris parmi eux des enfants d’Israël, de la tribu de Dan, [...] qui espèrent, comme les Rékabites, l’avènement proche du Messie sur les nuées des cieux 38. ” GE3 265.5

Un autre missionnaire découvrit une croyance semblable parmi les Tatars. L’un des prêtres lui posa cette question: « Quand aura lieu le second avènement du Christ?” Lorsqu’il répondit qu’il n’en savait rien, le prêtre parut très surpris d’une telle ignorance de la part de quelqu’un qui professait enseigner la Bible aux autres ; ce prêtre exprima sa propre conviction, fondée sur la prophétie, que pour lui le Christ reviendrait aux alentours de 1844. GE3 266.1

Dès 1826, le message du retour du Christ commença à être prêché en Angleterre. Mais, dans ce pays, le mouvement n’eut pas une ampleur aussi précise qu’en Amérique ; on n’y enseigna pas aussi généralement le moment exact du second avènement, cependant, on y proclama largement la grande vérité du proche retour de Jésus avec puissance et gloire, et pas seulement parmi les dissidents et les non-conformistes. Mourant Brock, un écrivain anglais, déclare qu’environ sept cents prédicateurs de l’Église d’Angleterre étaient occupés à prêcher «la bonne nouvelle du Règne 39 ». Le message désignant l’année 1844 comme l’époque de l’avènement du Seigneur gagna aussi la Grande-Bretagne. Des publications concernant cet avènement, provenant des États-Unis, furent largement diffusées. Des livres et des périodiques furent réédités. En 1842, Robert Winter, anglais de naissance, qui avait accepté la foi adventiste en Amérique, revint dans son pays natal pour y annoncer le retour du Seigneur. De nombreuses personnes se joignirent à lui dans cette œuvre pour proclamer le message du jugement dans diverses parties du pays. GE3 266.2

En Amérique du Sud, au milieu de la barbarie et de la domination des prêtres, Lacunza, un jésuite espagnol, découvrit les Écritures et accepta la vérité du proche retour du Christ. Se sentant poussé à donner cet avertissement, et désireux d’échapper à la censure de l’Église romaine, il publia ses opinions sous le nom d’emprunt de «Rabbi Ben-Ézra», se faisant passer pour un juif converti. Bien qu’il ait vécu au XVIIIe siècle, ce ne fut qu’en 1825 que son livre, arrivé à Londres, fut traduit en anglais. Sa publication contribua à approfondir l’intérêt déjà éveillé en Angleterre sur le sujet du second avènement. GE3 266.3

En Allemagne, cette doctrine avait été enseignée au XVIIIe siècle par Bengel, prédicateur de l’Église luthérienne, érudit et critique biblique renommé. Après avoir terminé ses études, il «se consacra à l’étude de la théologie, à laquelle le prédisposait naturellement la tournure grave et religieuse de son esprit, accentuée encore par l’éducation et la discipline de ses premières années. Comme d’autres jeunes gens de caractère réfléchi, venus avant et après lui, il dut lutter contre les doutes et les difficultés de nature religieuse. Il fait allusion, avec une profonde émotion, aux “nombreuses flèches qui percèrent son pauvre cœur et rendit sa jeunesse difficile à supporter”. » En devenant membre du Consistoire du Wurtemberg, il défendit la cause de la liberté religieuse. «Tout en maintenant les droits et les privilèges de l’Église, il fut l’avocat de toute liberté raisonnable accordée à ceux qui se sentaient appelés, pour motif de conscience, à se retirer de celle-ci 40. » Les effets salutaires de cette manière d’agir se ressentent encore dans sa province natale. GE3 266.4

C’est pendant qu’il préparait un sermon sur le chapitre 21 de l’Apocalypse pour un dimanche de l’Avent que la lumière sur le second avènement du Christ jaillit dans l’esprit de Bengel. Les prophéties de l’Apocalypse se dévoilèrent à sa compréhension comme jamais auparavant. Pénétré du sentiment de l’importance extraordinaire et de la gloire incomparable des scènes présentées par le prophète, il dut cesser pendant un certain temps d’étudier ce sujet. Alors qu’il prêchait du haut de la chaire, ce sujet se présenta de nouveau à lui dans toute sa vigueur et dans toute sa puissance. À partir de ce moment, il se consacra à l’étude des prophéties, en particulier celles de l’Apocalypse, et il arriva bientôt à la conviction que celles-ci indiquaient la proximité de l’avènement du Christ. La date qu’il fixa pour l’époque du second avènement n’était éloignée que de quelques années de celle fixée plus tard par William Miller. GE3 266.5

Les écrits de Bengel furent diffusés dans toute la chrétienté. Ses opinions sur la prophétie furent assez généralement acceptées dans son État du Wurtemberg, et, dans une certaine mesure, dans d’autres parties de l’Allemagne. Ce mouvement se poursuivit après sa mort, et le message du second avènement se fit entendre en Allemagne au même moment où il attirait l’attention dans d’autres pays. Très tôt, quelques-uns de ces croyants se rendirent en Russie, où ils fondèrent des colonies, de sorte que la foi au proche avènement du Christ est encore professée par les Églises allemandes de ce pays. GE3 267.1

Cette lumière brilla aussi en France et en Suisse. À Genève, où Guillaume Farel et Jean Calvin avaient répandu la vérité de la Réforme, Louis Gaussen prêcha le message du second avènement. Pendant ses études, il était entré en contact avec l’esprit du rationalisme, qui avait envahi toute l’Europe au cours de la dernière partie du XVIIIe siècle et du début du XIXe. Lorsqu’il commença son ministère, il n’était pas seulement ignorant de la véritable foi, mais penchait même vers le scepticisme. Pendant sa jeunesse, il s’était intéressé à l’étude de la prophétie. Après avoir lu l’Histoire ancienne de Rollin, son attention fut attirée sur le chapitre 2 du livre de Daniel, et il fut frappé par la merveilleuse exactitude avec laquelle cette prophétie s’était accomplie, comme le rapporte cet historien. Il y vit un témoignage de l’inspiration des Écritures, qui fut pour lui comme une ancre au milieu des périls des années suivantes. Les enseignements du rationalisme ne lui donnaient pas satisfaction. En étudiant la Bible et en cherchant davantage de lumière, il fut, au bout d’un certain temps, amené à une foi positive. GE3 267.2

En poursuivant l’étude des prophéties, il arriva à la conviction que l’avènement du Seigneur était proche. Impressionné par la solennité et l’importance de cette grande vérité, il souhaita l’apporter aux gens du peuple, mais la croyance populaire, prétendant que les prophéties de Daniel sont mystérieuses et incompréhensibles, constituait un sérieux obstacle sur son chemin. Il décida finalement, comme Farel l’avait fait avant lui en évangélisant Genève, de commencer par les enfants, par l’intermédiaire desquels il espérait éveiller l’intérêt des parents. GE3 267.3

« Je désire que l’on comprenne bien, dit-il plus tard, parlant de ses intentions dans cette entreprise, que ce n’est pas par manque d’importance, mais bien au contraire à cause de sa grande valeur, que je souhaitais présenter cet enseignement sous cette forme familière et que je l’ai adressé aux enfants. Je désirais être écouté, et je craignais de ne pas l’être si je m’adressais d’abord aux adultes. [...] J’ai donc décidé de me tourner vers les plus jeunes. Je rassemble un auditoire d’enfants. Si le groupe grandit en nombre, et s’il est évident que les enfants écoutent, qu’ils sont contents, intéressés, et qu’ils comprennent et expliquent le sujet, je suis sûr d’avoir bientôt un second auditoire. Et, à leur tour, les adultes se rendront compte qu’il vaut la peine de s’asseoir et d’étudier. Lorsque ceci sera fait, la cause sera gagnée 41 GE3 267.4

Ses efforts furent couronnés de succès. Tandis qu’il s’adressait aux enfants, d’autres personnes plus âgées vinrent écouter. Les galeries de son église se remplirent d’auditeurs attentifs. Parmi eux se trouvaient des personnes de haut rang et de haute érudition, ainsi que des étrangers de passage à Genève. De cette manière, le message fut porté dans d’autres parties du monde. GE3 268.1

Encouragé par ce succès, Louis Gaussen publia ses leçons, avec l’espoir de permettre ainsi l’étude des livres prophétiques dans les Églises francophones. « Publier des instructions données aux enfants, disait-il, c’est dire aux adultes, qui, trop souvent, négligent ces livres sous le faux prétexte qu’ils sont obscurs : “Comment peuvent-ils être obscurs, puisque vos enfants les comprennent?” J’avais le grand désir, ajoutait-il, de rendre la connaissance des prophéties populaire parmi nos troupeaux, si possible. [...] Aucune autre étude, en vérité, ne me semble mieux répondre aux besoins de notre époque. [....] C’est ainsi que nous devons nous préparer pour la tribulation qui est proche, veiller et attendre Jésus-Christ. » GE3 268.2

Bien qu’il ait été l’un des prédicateurs francophones les plus distingués et les plus aimés, Louis Gaussen fut démis de son ministère au bout d’un certain temps. Son principal crime était d’avoir utilisé la Bible pour l’instruction des jeunes au lieu du catéchisme de l’Église, un manuel insipide et rationaliste, presque dénué de toute foi positive. Il devint plus tard professeur dans une faculté de théologie, tout en continuant son œuvre de catéchiste, le dimanche, en s’adressant aux enfants et en les instruisant dans les Écritures. Ses œuvre s sur la prophétie suscitèrent aussi un vif intérêt. Depuis sa chaire d’enseignant, par le moyen de la presse et dans l’exercice de son occupation favorite d’instructeur des enfants, il continua, pendant de nombreuses années, à exercer une profonde influence et contribua à attirer l’attention de nombreuses personnes sur l’étude des prophéties qui montraient que l’avènement du Seigneur était proche. GE3 268.3

Le message du second avènement fut également proclamé en Scandinavie, et un vif intérêt y fut suscité. De nombreuses personnes s’éveillèrent de leur sécurité insouciante pour confesser et abandonner leurs péchés et rechercher le pardon au nom du Christ. Mais le clergé de l’Église d’État s’opposa à ce mouvement et usa de son influence pour faire emprisonner quelques-uns de ceux qui prêchaient ce message. Dans de nombreux endroits où les prédicateurs du proche avènement du Seigneur avaient été ainsi réduits au silence, Dieu trouva bon de le faire proclamer de manière miraculeuse, par la bouche de petits enfants. Du fait qu’ils étaient mineurs, la loi de l’État ne pouvait les empêcher, et ils purent parler sans être inquiétés. GE3 268.4

Ce mouvement se manifestait surtout parmi les classes inférieures de la société, et c’est dans les humbles foyers des travailleurs que les gens du peuple s’assemblaient pour entendre cet avertissement. Les enfants prédicateurs eux-mêmes appartenaient pour la plupart à de pauvres familles de paysans. Certains d’entre eux n’avaient pas plus de six à huit ans. Et, bien que leur vie témoignât qu’ils aimaient le Sauveur et qu’ils s’efforçassent de vivre en obéissant aux saintes exigences de Dieu, ils ne possédaient ordinairement que l’intelligence et les capacités qu’on rencontre habituellement chez les enfants de cet âge. En revanche, lorsqu’ils parlaient en public, il était évident qu’ils étaient animés par une influence qui dépassait leurs dons naturels. Ils changeaient de ton et de manières, et, avec puissance et solennité, ils donnaient l’avertissement du jugement, employant les mots mêmes de l’Écriture: « Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue 42.” Ils réprimaient les péchés, non seulement en condamnant l’immoralité et le vice, mais aussi en dénonçant la mondanité et les rechutes et en exhortant leurs auditeurs à se hâter de « fuir la colère à venir 43 GE3 268.5

On les écoutait en tremblant. L’Esprit de Dieu parlait au cœur , y apportant la conviction. Beaucoup furent amenés à sonder les Écritures avec un intérêt nouveau et plus profond. Ceux qui s’étaient adonnés à l’intempérance et à l’immoralité réformèrent leur vie. D’autres abandonnèrent leurs pratiques malhonnêtes. Il se fit une œuvre si prononcée que même les prédicateurs de l’Église d’État furent forcés de reconnaître que la main de Dieu était dans ce mouvement. GE3 269.1

C’était la volonté de Dieu que la nouvelle de l’avènement du Sauveur soit annoncée dans les pays scandinaves. Et, lorsque la voix de ses serviteurs fut réduite au silence, il mit son Ésprit sur ces enfants pour que son œuvre puisse s’accomplir. Lorsque Jésus approchait de Jérusalem, escorté par des foules joyeuses qui, en poussant des cris de triomphe et en agitant des branches de palmier, l’accueillaient comme le Fils de David, les Pharisiens, jaloux, lui intimèrent de les faire taire. Mais Jésus leur répondit que tout cela était l’accomplissement de la prophétie, et que, « si eux se taisent, ce sont les pierres qui crieront 44 ! » Les gens du peuple, intimidés par les menaces des sacrificateurs et des dirigeants, cessèrent de pousser leurs joyeuses exclamations en franchissant les portes de Jérusalem. Mais, dans le parvis du temple, les enfants reprirent ensuite ce refrain, et, agitant leurs branches de palmier, s’écrièrent: « Hosanna pour le Fils de David 45 ! » Lorsque les Pharisiens, profondément contrariés, lui dirent : «Tu entends ce qu’ils disent ? ”, Jésus répondit : « Oui. N’avez-vous jamais lu ces paroles : Par la bouche des tout-petits et des nourrissons tu t’es formé une louange 46 ! » De même que Dieu travailla par l’intermédiaire d’enfants au moment du premier avènement du Christ, de même il travailla aussi par leur intermédiaire pour proclamer le message du second avènement. La Parole de Dieu doit être accomplie, afin que la proclamation de l’avènement du Sauveur soit faite « à toute nation, tribu, langue et peuple 47 ». GE3 269.2

C’est à William Miller et à ses collaborateurs qu’il fut donné de prêcher cet avertissement en Amérique. Ce pays devint le centre du grand mouvement adventiste. C’est là que la prophétie du message du premier ange trouva son accomplissement le plus direct. Les écrits de William Miller et de ses collaborateurs furent apportés dans des pays lointains. Dans le monde entier, partout où des missionnaires avaient pénétré, l’heureuse nouvelle du proche retour du Christ fut annoncée. Le message de la « bonne nouvelle éternelle 48» se répandit auprès et au loin : « Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue 49. » GE3 269.3

Le témoignage des prophéties qui semblaient annoncer l’avènement du Christ pour le printemps de l’année 1844 produisit une profonde impression sur l’esprit des gens du peuple. Au fur et à mesure que ce message se propageait d’un État à l’autre, il suscitait partout un vif intérêt. Beaucoup furent convaincus que les arguments tirés des périodes prophétiques étaient justes, et, sacrifiant leur fierté et leurs opinions, acceptèrent la vérité avec joie. Certains prédicateurs mirent de côté leurs pensées et sentiments sectaires, renoncèrent à leur salaire, quittèrent leur Église et se joignirent à la proclamation de l’avènement de Jésus. GE3 270.1

Il y eut cependant comparativement peu de prédicateurs qui acceptèrent ce message. Il fut donc confié en grande partie à d’humbles laïcs. Des cultivateurs abandonnèrent leurs champs, des mécaniciens leurs outils, des commerçants leurs négoces, des professionnels leur occupation. Et, cependant, le nombre des ouvriers était petit, comparé à la grandeur de l’œuvre à accomplir. L’état spirituel d’une église impie et d’un monde plongé dans le mal pesait lourd sur le cœur des véritables sentinelles ; mais celles-ci subirent de bon cœur les durs labeurs, les privations et les souffrances, afin d’appeler les hommes à la repentance et au salut. Malgré l’opposition de Satan, l’œuvre progressait régulièrement, et des milliers de personnes acceptèrent la vérité du second avènement. GE3 270.2

Partout se fit entendre ce témoignage qui fouillait les consciences, exhortait les pécheurs, mondains ou membres d’Église, à «fuir la colère à venir 50 ». Comme Jean-Baptiste, le précurseur du Christ, ces prédicateurs s’appliquaient à « attaquer les arbres à la racine 51 » et invitaient tous les hommes à produire « un fruit digne du changement radical 52 ». Leurs appels émouvants contrastaient d’une manière marquée avec les paroles de « paix et sécurité 53 ! » prêchées du haut des chaires populaires. Partout où ce message était prêché, il touchait les cœurs. Le témoignage simple et direct des Écritures, pénétrant les âmes par la puissance du Saint-Esprit, produisait une conviction à laquelle peu étaient capables de résister entièrement. Ceux qui n’étaient religieux que de nom se réveillaient de leur fausse sécurité. Ils prenaient conscience de leurs rechutes, de leur mondanité et de leur incrédulité, de leur orgueil et de leur égoïsme. Beaucoup d’entre eux recherchaient le Seigneur dans la repentance et l’humiliation. Leurs affections, attachées depuis si longtemps aux choses de cette terre, se fixaient maintenant sur celles du ciel. L’Esprit de Dieu reposait sur eux, et, le cœur attendri et subjugué, ils se joignaient à la proclamation du cri « Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue 54 GE3 270.3

Des pécheurs demandaient en pleurant : « Que faut-il que je fasse pour être sauvé 55 ? » Ceux dont la vie avait été caractérisée par la malhonnêteté étaient désireux de restituer ce qu’ils avaient volé. Tous ceux qui avaient trouvé la paix en Christ brûlaient du désir de voir les autres partager cette même bénédiction. Le cœur des parents se tournait vers celui de leurs enfants, et le cœur des enfants vers celui de leurs parents 56. Les barrières de l’orgueil et des réserves étaient balayées. Des confessions sincères étaient faites, et les membres d’un même foyer travaillaient au salut de ceux qui leur étaient les plus proches et les plus chers. On entendait souvent le son de ferventes intercessions. Partout se trouvaient des personnes, saisies d’une profonde angoisse, plaidant avec Dieu. Beaucoup d’entre elles luttaient toute la nuit dans la prière, pour obtenir l’assurance du pardon de leurs péchés ou la conversion des membres de leur famille ou de leurs voisins. GE3 270.4

Des personnes de toutes les classes sociales accouraient aux réunions adventistes. Riches et pauvres, membres des classes supérieures et inférieures étaient, pour divers motifs, désireux d’entendre par eux-mêmes la doctrine du second avènement. Le Seigneur maintint en échec l’esprit d’opposition pendant que ses serviteurs expliquaient les raisons de leur foi. Parfois, les instruments qu’il utilisait étaient faibles, mais son Esprit conférait de la puissance à sa vérité. La présence de saints anges se faisait sentir dans ces assemblées, et de nombreuses personnes s’ajoutaient chaque jour au nombre des croyants. Pendant qu’on leur reparlait des preuves du proche avènement du Christ, de vastes foules écoutaient en silence ces paroles solennelles en retenant leur souffle. Le ciel et la terre semblaient se rapprocher. La puissance de Dieu se faisait sentir parmi les vieillards, les jeunes et les personnes d’âge mûr. Des hommes rentraient chez eux, la louange sur les lèvres, et leurs accents joyeux retentissaient dans l’air calme du soir. Personne, ayant assisté à ces réunions, ne pourra jamais oublier ces scènes du plus profond intérêt. GE3 271.1

La proclamation d’une date précise pour l’avènement du Christ suscita une forte opposition de la part de nombreuses personnes de toutes classes sociales, depuis le prédicateur dans sa chaire jusqu’au pécheur le plus insouciant et le plus provoquant. Les paroles de cette prophétie s’accomplirent : « Dans les derniers jours il viendra des moqueurs pleins de moqueries, qui iront au gré de leurs propres désirs et diront: Où est la promesse de son avènement? Car, depuis que les pères se sont endormis dans la mort, tout demeure comme depuis le commencement de la création 57. ” GE3 271.2

Beaucoup de ceux qui professaient aimer le Sauveur déclarèrent qu’ils n’étaient pas opposés à la doctrine du second avènement, mais seulement à la fixation d’une date précise. Mais l’oeil divin qui voit toutes choses avait lu dans leur cœur. Ils ne voulaient pas entendre parler du retour du Christ venant juger le monde avec justice. Ils avaient été des serviteurs infidèles. Leurs œuvre s ne pouvaient pas supporter l’inspection du Dieu qui sonde les cœur s, et ils redoutaient de rencontrer leur Seigneur. Comme les Juifs à l’époque du premier avènement du Christ, ils n’étaient pas prêts à accueillir Jésus. Non seulement ils refusèrent d’écouter les arguments évidents tirés de la Bible, mais ils tournèrent aussi en ridicule ceux qui attendaient le Seigneur. Satan et ses anges exultèrent et jetèrent au visage du Christ et des saints anges le reproche des prétendus disciples qui avaient si peu d’amour pour lui et ne désiraient pas le voir paraître. GE3 271.3

« Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît 58 », fut l’argument avancé le plus souvent par ceux qui rejetaient la foi au second avènement. Ce texte déclare: « Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît, ni les anges des cieux, ni le Fils, mais le Père seul. » Ceux qui attendaient le Seigneur en donnèrent une explication claire et harmonieuse, qui révéla clairement le mauvais usage que leurs opposants en avait fait. Le Christ avait prononcé ces paroles lors de la mémorable conversation avec ses disciples sur le mont des Oliviers après qu’il eut quitté le temple pour la dernière fois. Les disciples lui avaient posé la question : « Quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde 59 ? » Jésus leur indiqua des signes et leur dit : « Quand vous verrez tout cela, sachez qu’il est proche, aux portes 60 GE3 271.4

On ne doit jamais utiliser une déclaration du Sauveur pour en annuler une autre. Bien que personne ne connaisse le jour ni l’ heure de son avènement, Jésus nous instruit et attend de nous que nous sachions quand ce jour sera proche. Il nous apprend aussi que le fait de ne pas prendre garde à ses avertissements et de refuser ou de négliger de connaître l’approche de son avènement nous sera aussi fatal que pour ceux qui vivaient aux jours de Noé et ont ignoré l’approche du Déluge. La parabole contenue dans ce même chapitre, établissant le contraste entre le serviteur fidèle et le serviteur infidèle et indiquant le sort de celui qui dit dans son cœur « Mon maître tarde à venir 61 ”, nous montre sous quel jour le Christ considérera et récompensera ceux qu’il trouvera veillant et enseignant aux autres son avènement, et ceux qui le nieront. « Veillez donc 62», nous dit-il. «Heureux cet esclave, celui que son maître, à son arrivée, trouvera occupé de la sorte 63 ! » « Si tu ne veilles pas, je viendrai comme un voleur, et tu ne sauras pas du tout à quelle heure je viendrai te surprendre 64. » GE3 272.1

Paul nous parle d’une catégorie de personnes pour lesquelles l’apparition du Seigneur se fera à l’improviste: « Le jour du Seigneur viendra comme un voleur dans la nuit. Quand ils diront : “Paix et sécurité !”, alors la destruction arrivera sur eux [...] et ils n’échapperont en aucun cas 65.” Et il ajoute, à l’intention de ceux qui auront pris garde à l’avertissement du Sauveur: «Mais vous, frères, vous n’êtes pas dans les ténèbres, pour que ce jour, tel un voleur, vous surprenne; car vous êtes tous fils de la lumière et fils du jour. Nous n’appartenons pas à la nuit ni aux ténèbres 66 GE3 272.2

Ce qui montre que l’Écriture n’autorise personne à demeurer dans l’ignorance au sujet de la proximité de l’avènement du Christ. Mais ceux qui ne recherchaient qu’un prétexte pour rejeter la vérité fermèrent l’oreille à cette explication, et les paroles de Jésus, «Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît 67 », continuèrent à être répétées par les moqueurs audacieux et même par ceux qui se prétendaient serviteurs du Christ. Lorsque les gens s’éveillèrent et commencèrent à demander où trouver le chemin du salut, les conducteurs religieux s’interposèrent entre eux et la vérité, s’efforçant de calmer leurs craintes en interprétant faussement la Parole de Dieu. Des sentinelles infidèles se joignirent à l’œuvre du grand séducteur en criant «Paix! Paix!» alors que Dieu n’avait pas annoncé la paix. Comme les Pharisiens à l’époque du Christ, beaucoup d’entre eux refusaient d’entrer dans le royaume de Dieu, et en empêchaient « ceux qui voulaient entrer 68». Le sang de ces âmes leur sera réclamé. GE3 272.3

Dans les Églises, ce furent les plus humbles et les plus consacrés au Seigneur qui furent généralement les premiers à accepter ce message. Ceux qui étudiaient la Bible pouvaient se rendre compte que les opinions populaires sur la prophétie n’étaient pas bibliques. Partout où les hommes n’étaient pas dominés par l’influence du clergé, partout où ils se donnaient la peine de sonder la Parole de Dieu par eux-mêmes, la doctrine du second avènement n’avait besoin que d’être éclairée par les Écritures pour qu’on reconnaisse son autorité divine. GE3 273.1

Beaucoup d’entre eux furent persécutés par leurs frères incrédules. Pour pouvoir conserver leur place dans l’Église, quelques-uns consentirent à garder le silence au sujet de leur espérance; mais d’autres eurent le sentiment que la loyauté envers Dieu leur interdisait de dissimuler les vérités qui leur étaient confiées. Un assez grand nombre furent exclus de leur Église pour la simple raison qu’ils avaient exprimé leur croyance à l’avènement du Christ. Ceux qui durent subir cette épreuve trouvèrent un très précieux encouragement dans ces paroles du prophète : « Voici ce que disent vos frères, qui vous détestent et vous repoussent à cause de mon nom: “Que le Seigneur montre sa gloire, et que nous voyions votre joie!” Mais ce sont eux qui auront honte 69. ” GE3 273.2

Des anges de Dieu observaient avec le plus profond intérêt les conséquences de cet avertissement. Lorsqu’il y eut un rejet général de ce message par certaines Églises, les anges s’en détournèrent avec tristesse. Mais nombreuses furent les personnes qui n’avaient pas encore été éprouvées par la doctrine du second avènement. Beaucoup d’entre elles étaient égarées par leur mari, leur épouse, leurs parents ou leurs enfants ; on leur faisait croire que c’était un péché même d’écouter les hérésies enseignées par les adventistes. Des anges reçurent l’ordre de veiller fidèlement sur ces âmes, car une lumière nouvelle provenant du trône de Dieu allait encore briller sur elles. GE3 273.3

Avec une ardeur inexprimable, ceux qui avaient accepté ce message attendaient l’avènement de leur Sauveur. L’époque où ils espéraient le rencontrer était proche. Ils vivaient la proximité de cette heure avec un calme solennel et demeuraient dans une douce communion avec Dieu, ce qui était pour eux un avant-goût de la paix qui allait être la leur dans le monde à venir. Aucun de ceux qui ont vécu cette espérance et cette assurance ne pourra oublier ces précieuses heures d’attente. Pendant les quelques semaines qui précédèrent cette date, ils laissèrent en grande partie de côté les affaires de ce monde. Ces croyants sincères examinaient soigneusement chaque pensée et chaque émotion de leur cœur comme s’ils avaient été sur leur lit de mort et sur le point de fermer les yeux dans quelques heures sur les scènes de ce monde. GE3 273.4

Personne ne confectionna de « robes d’ascension 70» ; mais tous éprouvaient le besoin d’une conviction intérieure qu’ils étaient prêts à rencontrer leur Sauveur. Leur « robe blanche” était la pureté de leur âme, le caractère purifié du péché par le sang expiatoire du Christ. Si seulement on trouvait encore, chez ceux qui professent être le peuple de Dieu, le même désir d’introspection, la même foi fervente et déterminée! S’ils avaient continué ainsi à s’humilier devant le Seigneur et à présenter leurs requêtes devant le trône de miséricorde, ils auraient bénéficié d’une expérience bien plus riche que celle qu’ils possèdent maintenant. Il y a trop peu de prière, trop peu de véritable conviction du péché, et le manque de foi vivante laisse beaucoup de personnes privées de la grâce si abondamment fournie par notre Rédempteur. GE3 273.5

Dieu voulait éprouver son peuple. Sa main couvrit une erreur dans le calcul des périodes prophétiques que les adventistes ne découvrirent pas; même les plus instruits de leurs opposants ne la remarquèrent pas. Ces derniers disaient: « Votre calcul des périodes prophétiques est correct. Un grand événement est sur le point de se produire; mais ce n’est pas ce que M. Miller prédit; c’est la conversion du monde, et non le second avènement du Christ 71. ” GE3 274.1

Le moment tant souhaité passa, et le Christ n’apparut pas pour délivrer son peuple. Ceux qui, avec une foi et un amour sincères, avaient attendu leur Sauveur subirent une amère déception. Cependant, les desseins de Dieu étaient en cours d’accomplissement : il éprouvait le cœur de ceux qui disaient attendre l’apparition de Jésus. Il y en avait beaucoup parmi eux qui n’avaient pas été motivés par un sentiment plus élevé que la peur. Leur profession de foi n’avait affecté ni leur cœur, ni leur vie. Lorsque l’événement attendu n’eut pas lieu, ces personnes déclarèrent qu’elles n’éprouvaient aucune déception: elles n’avaient jamais cru que le Christ viendrait. Elles furent parmi les premières à tourner en ridicule le chagrin des véritables croyants. GE3 274.2

Cependant, Jésus et toute l’armée céleste contemplèrent avec amour et sympathie ceux qui étaient éprouvés et déçus, mais fidèles. Si on avait pu écarter le voile qui sépare le monde visible du monde invisible, on aurait vu des anges s’approcher de ces âmes persévérantes pour les protéger des traits enflammés de Satan. GE3 274.3