Le Grand Espoir- 3e édition

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17 - Les précurseurs du matin

L’une des vérités les plus solennelles et cependant les plus glorieuses révélées dans la Bible est celle du second avènement du Christ, qui viendra achever la grande œuvre de la rédemption. Au peuple de Dieu, pèlerin sur cette terre, laissé si longtemps « au pays des ténèbres et de l’ombre de mort 1 ” pour y séjourner, est donnée l’espérance précieuse et réjouissante de l’apparition de celui qui a dit : « C’est moi qui suis la résurrection et la vie 2 ”, « pour que celui qui est banni loin de lui ne le reste pas 3 ». La doctrine du second avènement de Jésus est l’idée dominante des Saintes Écritures. Depuis le jour où nos premiers parents quittèrent avec tristesse le jardin d’Éden, les enfants de la foi ont attendu la venue de celui qui avait été promis, pour qu’il brise la puissance du destructeur et les ramène au paradis perdu. Les saints hommes d’autrefois ont porté leurs regards vers l’avènement du Messie dans sa gloire, comme accomplissement de leur espérance. Hénoch, « le septième depuis Adam 4 ”, qui « marcha avec Dieu trois cents ans 5 ” sur la terre, eut le privilège de contempler de loin la venue du Libérateur: « Le Seigneur est venu avec ses saints par dizaines de milliers, déclara-t-il, afin d’exercer le jugement contre tous 6.» Le patriarche Job, dans les ténèbres de son affliction, s’exclama avec une confiance inébranlable : « Je sais bien, moi, que mon rédempteur est vivant, et qu’il se lèvera, le dernier, sur la poussière. ... De ma chair je verrai Dieu. Moi, je le verrai, mes yeux le verront, et non pas quelqu’un d’autre 7. ” GE3 219.1

L’avènement du Christ, venant instaurer le règne de la justice, a inspiré les expressions les plus sublimes et les plus passionnées des écrivains sacrés. Les poètes et les prophètes de la Bible en ont parlé en employant des mots qui brûlaient d’un feu céleste. Le psalmiste a chanté ainsi la puissance et la majesté du Roi d’Israël: « De Sion, beauté parfaite, Dieu paraît dans sa splendeur. Il vient, notre Dieu, il ne garde pas le silence. ... Il crie vers le ciel, en haut, et vers la terre, pour juger son peuple 8. » « Que le ciel se réjouisse, que la terre soit dans l’allégresse ! ... devant le Seigneur, car il vient! Car il vient pour juger la terre; il jugera le monde avec justice, il jugera les peuples par sa constance 9.” GE3 219.2

Le prophète Ésaïe avait déclaré: « Que tes morts revivent! Que mes cadavres se relèvent! Réveillez-vous et poussez des cris de joie, vous qui demeurez dans la poussière! Car ta rosée est une rosée de lumière, et la terre redonnera le jour aux ombres 10.” ” Il anéantira la mort pour toujours; le Seigneur Dieu essuiera les larmes de tous les visages ; il fera disparaître de toute la terre le déshonneur de son peuple — c’est le Seigneur qui parle. En ce jour-là on dira: C’est lui, notre Dieu! Nous avons mis notre espérance en lui et il nous a sauvés. C’est le GE3 220.1

Seigneur, en qui nous avons espéré: soyons dans l’allégresse, réjouissons-nous de son salut 11!” GE3 220.2

Le prophète Habacuc, ravi dans une sainte vision, contempla son apparition : « Dieu vient de Témân, le Saint vient du mont Parân. Son éclat couvre le ciel, sa louange remplit la terre. C’est comme la clarté de la lumière. [...] Il se dresse et prend la mesure de la terre, il regarde et fait sursauter les nations. Les montagnes d’antan se disloquent; devant lui s’effondrent les collines d’autrefois, les sentiers d’autrefois. [...]Tu montes sur tes chevaux, sur tes chars de victoire. [...] Les montagnes te voient et tremblent. [...] L’abîme fait entendre sa voix, il lève ses mains en haut. Le soleil — la lune s’arrête dans sa résidence à la lumière de tes flèches qui partent, à la clarté fulgurante de ta lance. [...] Tu sors pour le salut de ton peuple, pour le salut de l’homme qui a reçu ton onction 12. ” GE3 220.3

Lorsque le Sauveur était sur le point d’être séparé de ses disciples, il les réconforta, dans leur chagrin, en leur donnant l’assurance qu’il reviendrait: « Que votre cœur ne se trouble pas. [...] Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père. [...] Si donc je m’en vais vous préparer une place, je reviens vous prendre auprès de moi 13. » « Le Fils de l’homme viendra dans sa gloire avec tous ses anges ; il s’assiéra sur son trône glorieux. Toutes les nations seront rassemblées devant lui 14 » GE3 220.4

Les anges qui s’attardèrent sur le mont des Oliviers après l’ascension du Christ répétèrent aux disciples la promesse de son retour : «Ce Jésus, qui a été enlevé au ciel du milieu de vous, viendra de la même manière que vous l’avez vu aller au ciel 15.” L’apôtre Paul, parlant sous l’inspiration de l’Esprit, témoigne: « Le Seigneur lui-même, avec un cri de commandement, avec la voix d’un archange, avec le son de la trompette de Dieu, descendra du ciel 16.” Le voyant de Pathos déclare: « Il vient avec les nuées : tous le verront 17. » GE3 220.5

C’est autour de son avènement que gravitent les gloires du « rétablissement de tout ce dont Dieu a parlé par la bouche de ses saints prophètes d’autrefois 18. » Alors, le règne du mal, qui dure depuis si longtemps, sera brisé: « Le royaume du monde est passé à notre Seigneur et à son Christ ; il régnera à tout jamais 19 ! » «Alors la gloire du Seigneur se dévoilera, et tous la verront ensemble 20.” ” Le Seigneur Dieu fera germer la justice et la louange devant toutes les nations 21. ” GE3 220.6

« Le Seigneur des Armées sera une couronne de beauté et un diadème de splendeur pour le reste de son peuple 22. » GE3 221.1

C’est alors que le royaume de paix du Messie, désiré depuis si longtemps, sera instauré sous le ciel tout entier. «Le Seigneur console Sion, il console toutes ses ruines; il rendra son désert semblable à l’Éden et sa plaine aride au jardin du Seigneur 23. » « La gloire du Liban lui sera donnée, la magnificence du Carmel et de la plaine côtière 24.” «On ne te dira plus “Délaissée”, on ne dira plus ta terre “Dévastation” ; mais on t’appellera “Mon plaisir est en elle”, et on appellera ta terre “L’Épousée” 25.” «Comme la mariée fait la gaieté du marié, ainsi tu feras la gaieté de ton Dieu 26. » GE3 221.2

L’avènement du Seigneur a été, dans tous les siècles, l’espérance de ses véritables disciples. La promesse — donnée par le Sauveur lors de son discours d’adieu prononcé sur le mont des Oliviers — qu’il reviendrait illumina l’avenir de ses disciples en remplissant leur cœur d’une joie et d’une espérance que le chagrin ne put éteindre ni les épreuves ternir. Au milieu des souffrances et des persécutions, «la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus-Christ» fut leur «bienheureuse espérance 27. » Lorsque les chrétiens de Thessalonique furent dans la tristesse en enterrant leurs êtres chers, qui avaient espéré vivre assez longtemps pour assister à l’avènement du Seigneur, Paul, leur professeur, dirigea leurs regards vers la résurrection qui aurait lieu au moment de l’avènement du Sauveur, en leur disant : « Ceux qui sont morts dans le Christ se relèveront d’abord 28. » Puis, avec les vivants, tous seront «enlevés ensemble ... à la rencontre du Seigneur, dans les airs; et ainsi nous serons toujours avec le Seigneur. Encouragez-vous donc les uns les autres par ces paroles 29. ” GE3 221.3

Sur l’île rocheuse de Patmos, le disciple bien-aimé entendit cette promesse : «Oui, je viens bientôt»; et sa réponse ardente fait écho à la prière de l’Église tout le long de son pèlerinage : «Amen ! Viens, Seigneur Jésus 30 ! ” GE3 221.4

Depuis le cachot, le bûcher, l’échafaud, là où saints et martyrs témoignèrent pour la vérité, provient au travers des siècles l’expression de leur foi et de leur espérance. L’un de ces chrétiens déclara: «Assurés de la résurrection personnelle de Jésus, et, par conséquent, de la leur au moment de son avènement, ils méprisaient la mort et se hissaient au-dessus d’elle 31. » Ils étaient disposés à descendre au tombeau, pour pouvoir « se relever libres 32 ». Ils attendaient que «le Seigneur revienne du ciel sur les nuées “dans la gloire de son Père 33 ”, annonçant aux justes que le royaume est venu ». Les Vaudois professaient la même foi 34. Wycliffe attendait l’apparition du Rédempteur comme l’espérance de l’Église 35. GE3 221.5

Luther déclarait: «Je suis persuadé en vérité que le jour du jugement n’est pas éloigné de plus de trois cents ans. Dieu ne veut pas et ne peut pas tolérer que ce monde méchant dure encore plus longtemps 36. » « Le grand jour s’approche où le règne des abominations sera renversé 37. » GE3 222.1

« Ce vieux monde n’est pas éloigné de sa fin », disait Melanchthon. Calvin invitait les chrétiens à « désirer ardemment et sans hésitation le jour de l’avènement du Christ comme le plus heureux de tous les événements ». Et il déclarait que « toute la famille des fidèles gardera ce jour devant ses yeux”. « Nous devons avoir faim du Christ, disait-il, nous devons le rechercher, le contempler, jusqu’à l’aube de ce grand jour où notre Seigneur manifestera pleinement la gloire de son royaume 38.” GE3 222.2

« Le Seigneur Jésus n’a-t-il pas emporté notre humanité dans le ciel ? demandait John Knox, le réformateur de l’Écosse. Ne reviendra-t-il pas ? Nous savons qu’il reviendra, et qu’il ne tardera pas 39. » Dudley et Latimer, qui donnèrent leur vie pour la cause de la vérité, attendaient avec foi l’avènement du Seigneur. Dudley écrivit ceci : « Le monde, cela ne fait aucun doute — je le crois, et je peux donc l’affirmer — tire à sa fin. Avec Jean, le serviteur de Dieu, crions du fond de notre cœur au Christ, notre Sauveur : Viens, Seigneur Jésus, viens 40 ! » GE3 222.3

« La pensée de l’avènement du Seigneur, disait Richard Baxter, est pour moi extrêmement douce et joyeuse 41. » « Il appartient à l’œuvre de la foi et au caractère de ses saints d’aimer son apparition et d’attendre cette bienheureuse espérance. ... Si la mort est le dernier ennemi qui sera détruit au moment de la résurrection, cela nous enseigne avec quelle ferveur les croyants doivent aspirer au second avènement du Christ et prier pour sa réalisation, lorsque cette victoire pleine et finale aura été remportée 42. » « C’est le jour auquel tous les croyants doivent aspirer, qu’ils doivent espérer et attendre comme l’accomplissement de toute l’œuvre de leur rédemption et de tous les désirs et de tous les efforts de leur âme. ... Hâte, Seigneur, la venue de ce jour béni 43!” Telle était l’espérance de l’Église apostolique, de « l’Église du désert » et des réformateurs. GE3 222.4

Non seulement la prophétie prédit la manière et l’objet de l’avènement du Christ, mais elle nous présente aussi des signes qui permettront aux hommes de savoir quand celui-ci sera proche. Jésus a dit : « Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles 44.” ” Le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa clarté, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances qui sont dans les cieux seront ébranlées. Alors on verra le Fils de l’homme venant sur les nuées avec beaucoup de puissance, avec gloire 45. » Jean le révélateur décrit ainsi le premier des signes qui précéderont le second avènement: « Il y eut un grand tremblement de terre; le soleil devint noir comme un sac de crin ; la lune entière devint comme du sang 46. » GE3 222.5

Ces signes ont été observés avant le début du XIXe siècle. En accomplissement de cette prophétie eut lieu, en 1755, le plus terrible tremblement de terre jamais rapporté dans les annales de l’Histoire. Bien qu’il soit généralement connu sous le nom de « tremblement de terre de Lisbonne ”, il s’étendit à la plus grande partie de l’Europe, de l’Afrique et de l’Amérique. Il fut ressenti au Groenland, aux Antilles, sur l’île de Madère, en Norvège et en Suède, en Grande-Bretagne et en Irlande. Il toucha une étendue d’environ neuf millions de kilomètres carrés. En Afrique, la secousse fut presque aussi violente qu’en Europe. En Algérie, une grande partie de la ville d’Alger fut détruite; et, près de la frontière marocaine, un village entier de 8 000 à 10 000 habitants fut englouti. Une vague gigantesque balaya les côtes d’Espagne et d’Afrique, engloutissant des villes et provoquant de graves destructions. GE3 222.6

C’est en Espagne et au Portugal que la secousse fut la plus violente. On raconte qu’à Cadix, la vague qui se précipita sur la terre atteignait 18 mètres de haut. Des montagnes, « certaines des plus hautes du Portugal, furent violemment secouées, pour ainsi dire, jusqu’à leurs fondations, et quelques-unes d’entre elles s’ouvrirent à leur sommet, qui se fendit et se déchira d’une manière remarquable, projetant dans les vallées adjacentes d’énormes masses rocheuses. On raconte que des flammes jaillissaient de ces montagnes 47. » GE3 223.1

À Lisbonne, « on entendit un grondement de tonnerre souterrain, puis, immédiatement après, une violente secousse fit effondrer la plus grande partie de cette ville. Dans l’espace d’environ six minutes, 60000 personnes perdirent la vie. La mer commença par se retirer, découvrant la grève ; puis elle revint avec force, s’élevant à 15 mètres ou plus au-dessus de son niveau normal. a...] Parmi d’autres événements extraordinaires en rapport avec ce qui se passa à Lisbonne pendant cette catastrophe, on rapporte l’affaissement d’un nouveau quai, construit à grands frais entièrement en marbre. Une grande foule s’y était rassemblée, à la recherche d’un lieu sûr, un endroit où on serait à l’abri des chutes de pierres provenant des maisons qui s’effondraient; mais, soudain, le quai s’affaissa avec tout son chargement humain. Jamais un seul cadavre ne remonta à la surface 48. ” GE3 223.2

« La secousse du tremblement de terre fut suivie instantanément par l’effondrement de toutes les églises et de tous les couvents, de presque tous les grands édifices publics et de plus du quart des maisons. Environ deux heures après cette secousse, des incendies éclatèrent dans différents quartiers et firent rage avec une telle violence, pendant l’espace de presque trois jours, que la ville fut complètement réduite en ruines. Ce tremblement de terre eut lieu un jour de fête, alors que les églises et les couvents étaient pleins. Il y eut très peu de survivants 49. » « La terreur qui s’empara de la population était indescriptible. Personne ne pleurait; tous étaient au-delà des larmes. Les gens couraient çà et là, fous d’horreur et de stupéfaction, se frappant le visage et la poitrine, et hurlant: “Miséricorde! C’est la fin du monde!” Des mères oubliaient leurs enfants et couraient çà et là, les bras chargés de crucifix. Malheureusement, de nombreuses personnes cherchèrent refuge dans les églises ; mais c’est en vain que le Saint-Sacrement était exposé; c’est en vain que ces malheureux se saisirent des autels ; images, prêtres et fidèles furent engloutis dans la même ruine. » On estime que 90 000 personnes perdirent la vie en ce jour funeste. GE3 223.3

Vingt-cinq ans plus tard apparut le second signe mentionné dans la prophétie: l’obscurcissement du soleil et de la lune. Ce phénomène fut rendu encore plus frappant par le fait que le moment de son accomplissement avait été annoncé avec précision. Dans la conversation du Sauveur avec ses disciples sur le Mont des Oliviers, après avoir décrit la longue période d’épreuves par laquelle devait passer l’Église, les 1 260 années de persécution papale, au sujet de laquelle il avait promis que « ces jours-là seront abrégés 50 ”, il mentionna certains événements qui devaient précéder son avènement et fixa le moment où le premier d’entre eux serait observé : « En ces jours-là, après cette détresse-là, le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa clarté 51. » Les 1260 jours ou années prirent fin en 1798. Un quart de siècle plus tôt, la persécution avait presque totalement cessé. C’est après cette persécution, selon les paroles du Christ, que le soleil devait s’obscurcir. Cette prophétie s’accomplit le 19 mai 1780. GE3 223.4

« Le jour obscur du 19 mai 1780, l’obscurcissement, resté inexpliqué, de l’ensemble du ciel visible et de l’atmosphère en Nouvelle-Angleterre a...] demeure presque l’unique, sinon absolument l’unique phénomène de son genre 52. » GE3 224.1

Un habitant du Massachusetts, témoin oculaire de cet événement, le décrit comme suit: « Le matin, le soleil se leva radieux, mais fut bientôt couvert. Les nuages devinrent menaçants, et, peu de temps après, sombres et inquiétants ; il en sortit bientôt des éclairs, des roulements de tonnerre et une petite pluie fine. Vers neuf heures du matin, les nuages s’éclaircirent et prirent une teinte cuivrée ou bronzée. Terre, rochers, bâtiments, eaux et personnes furent transformés par cette lumière étrange et surnaturelle. Quelques minutes plus tard, un lourd nuage noir s’étendit sur l’ensemble du ciel, ne laissant qu’une étroite bande éclairée à l’horizon, et il fit aussi sombre que généralement à neuf heures par un soir d’été. [...] GE3 224.2

« La peur, l’angoisse et la terreur s’emparèrent peu à peu de l’esprit des gens. Des femmes se tenaient sur le seuil de leur porte, contemplant le paysage obscurci ; les hommes revinrent de leurs travaux des champs ; le charpentier abandonna ses outils, le forgeron sa forge, le commerçant son comptoir. Les enfants furent congédiés des écoles et rentrèrent chez eux en tremblant. Les voyageurs demandèrent asile à la ferme le plus proche. “Que va-t-il arriver ?” Cette question était sur toutes les lèvres et dans tous les cœurs. On aurait dit qu’un ouragan était sur le point de s’abattre sur tout le pays, ou comme si le jour de la fin de toutes choses était arrivé. GE3 224.3

« On alluma des chandelles ; dans les foyers, les feux brillaient avec autant d’éclat que par un soir d’automne sans lune. ... La volaille se retira sur ses perchoirs et s’endormit; le bétail se rassembla à l’entrée des pâturages en meuglant; les grenouilles se mirent à coasser; les oiseaux firent entendre leur chant du soir, et les chauves-souris se mirent à voleter. Mais les humains savaient bien que la nuit n’était pas tombée. [...] GE3 224.4

« Le D’ Nathanael Whittaker, pasteur de l’Église du Tabernacle à Salem, tint des services religieux dans la chapelle et prêcha un sermon dans lequel il affirma que ces ténèbres étaient surnaturelles. Les fidèles s’assemblèrent en de nombreux autres endroits. Les textes bibliques choisis pour ces sermons improvisés furent invariablement ceux qui semblaient indiquer que ces ténèbres correspondaient à la pro phétie biblique. [...] C’est peu après onze heures du matin que ces ténèbres furent les plus épaisses 53. ” GE3 224.5

« Dans la plus grande partie du pays, ces ténèbres étaient si épaisses en plein jour qu’on ne pouvait pas lire l’heure sur une montre ou sur une horloge, ni manger, ni se livrer aux activités domestiques sans la lumière des chandelles.... GE3 225.1

« L’étendue de ces ténèbres fut extraordinaire. On les observa jusqu’à Falmouth, à l’Est. Elles s’étendirent jusqu’à l’autre extrémité du Connecticut et jusqu’à Albany, à l’Ouest. Au Sud, on les observa le long des côtes ; et, au Nord, aussi loin que s’étendaient les colonies américaines 54. » GE3 225.2

Les épaisses ténèbres de cette journée firent place, une heure ou deux avant le soir, à un ciel partiellement dégagé, et le soleil apparut, bien qu’il soit encore voilé par cette brume noire et épaisse. «Après le coucher du soleil, les nuages se rassemblèrent de nouveau au-dessus de nos têtes, et l’obscurité devint rapidement très épaisse. ... Les ténèbres de cette nuit ne furent pas moins inhabituelles et terrifiantes que celles de la journée précédente; bien que ce soit presque la pleine lune, on ne pouvait rien discerner sans l’aide d’une lumière artificielle, qui, lorsqu’on la voyait à distance depuis les maisons voisines et d’autres endroits, apparaissait à travers une sorte de ténèbres d’Égypte qui semblaient presque imperméables aux rayons de lumière 55. ” GE3 225.3

Un témoin oculaire de cette scène déclara: « Je ne pus m’empêcher de penser à ce moment que, si tous les luminaires de l’univers avaient été enveloppés dans des ombres impénétrables, ou anéantis, les ténèbres n’auraient pas pu être plus épaisses 56. » Bien que la lune ait été pleine à neuf heures du soir, « elle n’eut pas le plus petit effet pour dissiper ces ombres mortelles ». Après minuit, les ténèbres disparurent, et la lune, lorsqu’elle devint visible, avait l’apparence du sang. GE3 225.4

Le 19 mai 1780 est resté dans l’Histoire sous le nom de « jour obscur ». Depuis l’époque de Moïse, aucune période d’obscurité d’une telle densité, d’une telle étendue et d’une telle durée n’avait jamais été rapportée. La description de cet événement, telle qu’elle a été faite par des témoins oculaires, n’est que l’écho des paroles du Seigneur rapportées par le prophète Joël deux mille cinq cents ans avant leur accomplissement: « Le soleil se changera en ténèbres, la lune en sang, avant que n’arrive le jour du Seigneur, ce jour grand et redoutable 57. » GE3 225.5

Le Christ avait recommandé à son peuple de surveiller les signes de son avènement et de se réjouir en apercevant ceux qui annonçaient l’approche de leur Roi. «Quand cela commencera d’arriver, leur dit-il, redressez-vous et levez la tête, parce que votre rédemption approche 58. » Il attira l’attention de ses disciples vers les arbres qui bourgeonnaient au printemps et leur dit: « Dès qu’ils bourgeonnent, vous savez de vous-mêmes, en regardant, que déjà l’été est proche. De même, vous aussi, quand vous verrez ces choses arriver, sachez que le règne de Dieu est proche 59. ” GE3 225.6

Mais, au fur et à mesure que l’esprit d’humilité et de piété dans l’Église cédait la place à l’orgueil et au formalisme, l’amour pour le Christ et la foi en son avènement se refroidissaient. Absorbés par la mondanité et la recherche du plaisir, ceux qui professaient être le peuple de Dieu étaient aveugles aux instructions du Sauveur sur les signes de son avènement. On avait négligé la doctrine du second avènement; on avait obscurci par de fausses interprétations les textes des Écritures qui le mentionnaient, au point qu’on l’ignora et qu’on l’oublia dans une grande mesure. Ce fut spécialement le cas dans les Églises d’Amérique. La liberté et le confort dont jouissaient toutes les classes de la société, le désir ambitieux de richesse et de luxe, faisant de la recherche du gain la préoccupation principale de la vie, la course avide à la popularité et au pouvoir, qui semblaient être à la portée de tous, amena les hommes à centrer leurs intérêts et leurs espérances sur les choses de cette vie et à repousser dans un lointain avenir le jour solennel où le présent ordre des choses disparaîtra. GE3 226.1

Lorsque le Sauveur attira l’attention de ses disciples sur les signes de son retour, il prédit l’état d’apostasie qui prévaudrait juste avant son second avènement. On verrait, comme à l’époque de Noé, l’activité et l’agitation des affaires de ce monde et de la recherche du plaisir: acheter, vendre, planter, construire, se marier et donner en mariage, pendant qu’on oublierait Dieu et la vie future. L’avertissement du Christ à ceux qui vivraient à cette époque est : « Prenez garde à vous-mêmes, de peur que votre cœur ne s’alourdisse dans les excès, les ivresses et les inquiétudes de la vie, et que ce jour n’arrive sur vous à l’improviste. a...] Restez donc éveillés et priez en tout temps, afin que vous ayez la force d’échapper à tout ce qui va arriver et de vous tenir debout devant le Fils de l’homme 60 GE3 226.2

L’état de l’Église de cette époque nous est décrit par les paroles du Sauveur dans l’Apocalypse : «Tu es réputé vivant, mais tu es mort 61. » A ceux qui refusent de s’éveiller de leur sécurité insouciante, cet avertissement solennel est adressé: « Si tu ne veilles pas, je viendrai comme un voleur, et tu ne sauras pas du tout à quelle heure je viendrai te surprendre 62. ” GE3 226.3

Il était nécessaire que les hommes s’éveillent au danger qu’ils couraient; qu’ils s’éveillent pour se préparer aux événements solennels associés à la fin du temps de grâce. Le prophète de Dieu déclare: « Le jour du Seigneur est grand, il est très redoutable : qui pourra le supporter 63 ? » Qui pourra subsister devant celui dont les «yeux sont trop purs pour voir ce qui est mauvais », qui ne peut « pas regarder l’oppression 64 » ? Pour ceux qui crient « Mon Dieu! Nous te connaissons 65 », tout en transgressant son alliance, et qui « se hâtent auprès de lui [un autre dieu] 66 », en entretenant l’iniquité dans leur cœur et en aimant les sentiers de l’iniquité, le jour du Seigneur sera « plutôt ténèbres, [...] obscur, sans clarté 67 ». Le Seigneur dit: « En ce temps-là, je fouillerai Jérusalem avec des lampes, et je ferai rendre des comptes aux hommes qui croupissent sur leur lie, et qui se disent: Le Seigneur ne fait ni bien ni mal 68. » « Je ferai rendre des comptes au monde pour le mal, et aux méchants pour leur faute; je ferai cesser l’orgueil des gens arrogants, je rabaisserai le triomphe des brutes 69.” ” Ni leur argent ni leur or ne pourront les délivrer 70. » « Leurs biens seront saccagés, et leurs maisons seront dévastées 71. ” GE3 226.4

Le prophète Jérémie, jetant les regards en avant vers cette terrible époque, s’exclamait: «Je souffre de toutes les fibres de mon cœur! ... Je ne peux pas garder le silence; car j’entends le son de la trompe, les acclamations de la guerre. On annonce désastre sur désastre 72. ” GE3 227.1

« Ce jour est un jour de colère, un jour de détresse et de désarroi, un jour de tourmente et de ravage, un jour de ténèbres et d’obscurité, un jour de nuée et d’obscurité épaisse, un jour où sonne la trompe, un jour d’acclamations guerrières 73. » « Le jour du Seigneur arrive. ... Il réduira la terre en un lieu dévasté, il en fera disparaître les pécheurs 74. » GE3 227.2

C’est en vue de ce grand jour que la Parole de Dieu, utilisant le langage le plus solennel et le plus impressionnant, invite son peuple à s’éveiller de son sommeil spirituel et à chercher sa face dans la repentance et l’humiliation: « Sonnez de la trompe en Sion ! Lancez des acclamations dans ma montagne sacrée ! Que tous les habitants du pays tremblent! Car le jour du Seigneur vient, il est proche 75.” ” Consacrez un jeûne, proclamez une assemblée solennelle ! Réunissez le peuple, consacrez une assemblée! Rassemblez les anciens, réunissez les enfants ... ! Que le marié sorte de sa chambre, la mariée de sa tente! Qu’entre le vestibule et l’autel pleurent les prêtres, les officiants du Seigneur 76. » « Revenez à moi de tout votre cœur, avec des jeûnes, des pleurs et des lamentations! Ne déchirez pas vos vêtements, mais votre cœur, et revenez au Seigneur, votre Dieu ; car il est clément et compatissant, patient et grand par la fidélité 77. ” GE3 227.3

Pour préparer un peuple à subsister au jour du Seigneur, une grande œuvre de réforme devait avoir lieu. Dieu voyait qu’un grand nombre de ceux qui professaient être son peuple ne bâtissaient pas pour l’éternité, et, dans sa clémence, il allait leur envoyer un message d’avertissement pour les éveiller de leur torpeur et les amener à se préparer pour l’avènement du Seigneur. GE3 227.4

Cet avertissement est décrit dans le chapitre 14 de l’Apocalypse. On y trouve un triple message, présenté comme s’il était proclamé par des êtres célestes, et immédiatement suivi de l’avènement du Fils de l’homme, venu moissonner «la moisson de la terre 78 ». Le premier de ces avertissements annonce l’approche du jugement. Le prophète contempla «un ange qui volait au milieu du ciel; il avait une bonne nouvelle éternelle à annoncer aux habitants de la terre, à toute nation, tribu, langue et peuple. Il disait d’une voix forte: Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l’heure de son jugement est venue, et prosternez-vous devant celui qui a fait le ciel, la terre, la mer et les sources d’eau 79! ” GE3 227.5

Ce message est présenté comme faisant partie de la « bonne nouvelle éternelle ». Ce n’est pas aux anges, mais aux hommes qu’a été confiée l’œuvre de la prédication de l’Évangile. Dieu a employé de saints anges pour diriger cette œuvre; il leur a confié les grandes interventions en faveur du salut des hommes ; mais ce sont les serviteurs du Christ sur cette terre qui assurent la proclamation de l’Évangile. GE3 228.1

C’étaient des hommes fidèles, obéissants aux appels de l’Esprit de Dieu et aux enseignements de sa Parole qui allaient proclamer cet avertissement au monde. C’étaient ceux qui avaient pris garde à « la parole prophétique ... comme à une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le jour commence à poindre et que l’étoile du matin se lève 80. » Ils avaient recherché la connaissance de Dieu plus que tous les trésors cachés, considérant celle-ci comme « préférable au gain de l’argent, et ce qu’elle rapporte vaut mieux que l’or 81 ». C’est à eux que le Seigneur révéla les grandes choses concernant son royaume. « Les secrets du Seigneur sont pour ceux qui le craignent, pour leur faire connaître son alliance 82. » GE3 228.2

Ce ne furent pas les savants théologiens qui comprirent cette vérité et se consacrèrent à la proclamer. Si ces derniers avaient été de fidèles sentinelles, sondant les Écritures avec zèle et dans un esprit de prière, ils auraient su à quel moment de la nuit ils étaient arrivés ; les prophéties auraient ouvert à leur esprit les événements qui allaient se produire. Mais ce n’est pas à eux que cette mission fut confiée, et ce furent d’humbles hommes qui annoncèrent ce message. Jésus avait dit: « Marchez pendant que vous avez la lumière, pour que les ténèbres ne vous surprennent pas 83. » Ceux qui se détournent de la lumière que Dieu a donnée, ou qui négligent de la rechercher pendant qu’elle est à leur portée, se retrouvent dans les ténèbres. Mais le Sauveur a déclaré : « Celui qui me suit ne marchera jamais dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie84. » Quiconque a pour seul but de chercher à réaliser la volonté de Dieu, en prenant garde avec ferveur à la lumière déjà donnée en recevra une plus grande. Une étoile de lumière céleste sera envoyée à cette âme pour la « conduire dans toute la vérité 85 ». GE3 228.3

À l’époque de la première venue du Christ, les sacrificateurs et les scribes de la sainte cité, auxquels avaient été confiés les oracles de Dieu, auraient pu discerner les signes des temps et proclamer l’avènement de celui qui avait été promis. La prophétie de Michée annonçait le lieu de sa naissance 86 ; Daniel avait précisé l’époque de son avènement 87. Dieu avait confié ces prophéties aux dirigeants juifs ; ceux-ci n’avaient aucune excuse s’ils ignoraient et n’annonçaient pas aux gens du peuple que la venue du Messie était proche. Leur ignorance était le résultat de leur négligence coupable. Les Juifs érigeaient des monuments aux prophètes de Dieu qui avaient été mis à mort, pendant que, par leur complaisance envers les grands de ce monde, ils rendaient hommage aux serviteurs de Satan. Absorbés par leurs conflits ambitieux pour obtenir une place et le pouvoir parmi les hommes, ils perdirent de vue les honneurs divins que le Roi du ciel leur avait offerts. GE3 228.4

C’est avec un intérêt profond et respectueux que les anciens d’Israël auraient dû étudier en quel lieu, « quelle époque et quelles circonstances 88 » allait avoir lieu le plus grand événement de l’Histoire du monde : la venue du Fils de Dieu, venant réaliser la rédemption de l’homme. Tous les gens du peuple auraient dû veiller et se préparer pour être parmi les premiers à accueillir le Rédempteur du monde. Mais voici qu’à Bethléem, deux voyageurs fatigués, venus des collines de Nazareth, parcourent toute la longueur de la rue étroite jusqu’à l’extrémité est de la ville, cherchant en vain un lieu d’asile et de repos pour la nuit. Aucune porte ne s’ouvre pour les accueillir. C’est dans une pauvre étable qu’ils trouvent enfin asile, et c’est là que naît le Sauveur du monde. GE3 229.1

Les anges du ciel avaient vu la gloire que le Fils de Dieu partageait avec le Père avant la fondation du monde, et ils avaient attendu avec un intérêt intense le moment de son apparition sur la terre comme un événement porteur de la plus grande joie pour tout le peuple. Des anges furent désignés pour apporter la bonne nouvelle à ceux qui s’étaient préparés à la recevoir et qui la feraient connaître avec joie aux habitants de la terre. Le Christ s’était abaissé jusqu’à revêtir la nature humaine. Il allait porter un poids infini de souffrance en offrant son âme en sacrifice pour le péché. Cependant, les anges désiraient que, même dans son humiliation, le Fils du Très-Haut puisse paraître devant les hommes avec une dignité et une gloire en rapport avec son caractère. Les grands de ce monde allaient-ils se rassembler dans la capitale d’Israël pour accueillir sa venue? Des légions d’anges allaient-elles le présenter aux foules qui l’attendraient? GE3 229.2

Un ange visite notre terre pour voir qui est prêt à accueillir Jésus. Mais il ne discerne aucun signe qu’il soit attendu. Il n’entend aucune parole de louange et de triomphe annonçant que le moment de l’avènement du Messie est arrivé. L’ange plane pendant quelque temps au-dessus de la cité élue et du temple, dans lequel la présence divine s’est manifestée pendant des siècles ; mais là aussi règne la même indifférence. Les sacrificateurs, avec pompe et orgueil, offrent des sacrifices souillés dans le temple. Les pharisiens haranguent le peuple à grands cris ou prononcent des prières prétentieuses au coin des rues. Dans le palais des rois, dans les assemblées de philosophes, dans les écoles des rabbins, tous sont également indifférents à cet événement merveilleux qui a rempli tout le ciel de joie et de louange: le Rédempteur des hommes est sur le point d’apparaître sur la terre. GE3 229.3

Aucun signe que le Christ soit attendu; aucune préparation n’a été faite pour accueillir le Prince de la vie. Stupéfait, le messager céleste est sur le point de repartir au ciel avec la nouvelle honteuse, lorsqu’il découvre un groupe de bergers qui gardent leurs troupeaux pendant la nuit. En contemplant le ciel étoilé, ils méditent sur la prophétie qui annonce un Messie qui doit venir sur la terre, et ils désirent ardemment la venue du Rédempteur du monde. Voilà un groupe qui est prêt à recevoir le message céleste! Soudain, l’ange du Seigneur leur apparaît et leur annonce « la bonne nouvelle d’une grande joie 89 ». Une gloire céleste inonde toute la plaine, un groupe innombrable d’anges apparaît, et, comme si la joie était trop grande pour être annoncée par un seul messager du ciel, une multitude de voix se fait entendre en un hymne que toutes les nations des sauvés entonneront un jour: « Gloire à Dieu dans les lieux très hauts, et, sur la terre, paix parmi les humains 90 ! » GE3 229.4

Quelle leçon nous donne cette merveilleuse histoire de Bethléem ! Quelle réprimande pour notre incrédulité, notre orgueil et notre propre suffisance! Quel avertissement à prendre garde, de peur que, par une indifférence criminelle, nous ne sachions pas non plus discerner les signes des temps, et, par conséquent, reconnaître «le temps de l’intervention divine 91 ”! GE3 230.1

Ce ne fut pas seulement sur les collines de Judée, ni parmi les humbles bergers, que les anges trouvèrent ceux qui attendaient l’avènement du Messie. Dans les pays païens aussi se trouvaient ceux qui l’attendaient; c’étaient des sages, des hommes riches et nobles, les philosophes de l’Orient. Les mages, en étudiant la Nature, avaient vu Dieu dans ses ouvrages. Par les Écritures hébraïques, ils avaient appris à connaître « l’astre [qui] sort de Jacob 92 », et ils aspiraient ardemment à l’avènement de celui qui allait être non seulement « la consolation d’Israël 93 », mais aussi la « lumière pour la révélation aux nations 94 », « pour porter le salut jusqu’aux extrémités de la terre 95 ». Ils recherchaient la lumière, et la lumière provenant du trône de Dieu illumina leur sentier. Tandis que les sacrificateurs et les rabbins de Jérusalem, gardiens et interprètes désignés de la vérité, étaient enveloppés de ténèbres, l’étoile envoyée du ciel guida ces étrangers païens vers le lieu de naissance du Roi nouveau-né. GE3 230.2

C’est « pour ceux qui l’attendent en vue du salut” que le Christ « apparaîtra une seconde fois, en dehors du péché 96 ». Comme la nouvelle de la naissance du Sauveur, le message de sa seconde venue ne fut pas confié non plus aux chefs religieux du peuple. Ils n’avaient pas su conserver leur relation avec Dieu et avaient refusé la lumière envoyée du ciel ; ils ne faisaient donc pas partie de ceux que décrit l’apôtre Paul: « Mais vous, frères, vous n’êtes pas dans les ténèbres, pour que ce jour, tel un voleur, vous surprenne; car vous êtes tous fils de la lumière et fils du jour. Nous n’appartenons pas à la nuit ni aux ténèbres 97. » GE3 230.3

Les sentinelles sur les murs de Sion auraient dû être les premières à recevoir la nouvelle de l’avènement du Sauveur, les premières à élever la voix pour annoncer qu’il était proche, les premières à avertir les gens du peuple de se préparer à son avènement. Mais elles avaient l’esprit tranquille, rêvant de « paix et [de] sécurité 98 », tandis que les gens du peuple étaient endormis dans leurs péchés. Jésus voyait son Église, comme le figuier stérile, couverte de feuilles prétentieuses ; mais le précieux fruit était absent. On observait avec ostentation les formes extérieures de la religion, tandis que l’esprit de véritable humilité, de véritable repentance et de véritable foi, qui seul peut rendre notre service acceptable aux yeux de Dieu, était absent. Au lieu des grâces de l’Esprit se manifestaient l’orgueil, le formalisme, la gloriole, l’égoïsme et l’oppression. Une Église apostate fermait les yeux sur les signes des temps. Ce n’est pas Dieu qui l’avait abandonnée, ni qui avait manqué de fidélité envers elle; mais c’est elle qui s’était détournée de lui et s’était séparée de son amour. Puisqu’elle refusait de remplir les conditions posées, elle ne pouvait pas bénéficier des promesses qui lui avaient été faites. GE3 230.4

Voilà ce qui arrive quand on néglige d’apprécier la lumière et les privilèges accordés par Dieu et de les mettre à profit. Si l’Église ne suit pas les signes de la providence divine en acceptant tous les rayons de lumière et en accomplissant tous les devoirs qui peuvent lui être révélés, la religion dégénère inévitablement en observance de formes extérieures, et l’esprit de véritable piété disparaît. Cette vérité a été illustrée à de nombreuses reprises dans l’Histoire de l’Église. Dieu demande à son peuple des œuvres de foi et une obéissance correspondant aux bénédictions et aux privilèges accordés. L’obéissance demande un sacrifice et implique une croix; c’est pourquoi beaucoup de ceux qui se prétendaient disciples du Christ refusèrent de recevoir la lumière céleste, et, comme les Juifs d’autrefois, ne reconnurent pas « le temps de l’intervention divine 99 ». À cause de leur orgueil et de leur incrédulité, le Seigneur les laissa de côté et révéla sa vérité à ceux qui, comme les bergers de Bethléem et les mages venus d’Orient, avaient pris garde à toute la lumière qu’ils avaient reçue. GE3 231.1