Messages choisis, vol. 2

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Chapitre 3

Par ses mauvaises habitudes, la famille humaine s'est attiré toutes sortes de maladies. On ne s'est pas ingénié à vivre d'une manière saine; la transgression des lois de l'être a eu des résultats déplorables. Les gens ont rarement attribué leurs souffrances à la véritable cause — leurs erreurs de conduite. Ils se sont livrés à l'intempérance dans le manger; ils ont fait un dieu de leur appétit. Dans toutes leurs habitudes ils se sont montrés insouciants en ce qui concerne la santé et la vie; quand il en est résulté la maladie, ils se sont persuadés que Dieu en était l'auteur, au lieu de reconnaître que ce résultat était dû à leurs erreurs de conduite. Quand ils se trouvent en difficulté ils font appeler le médecin et lui confient leur corps, s'attendant qu'il les guérisse. Il leur administre des drogues dont ils ignorent la nature; ils avalent aveuglément tout ce que le médecin pense devoir leur prescrire. De cette manière, des poisons violents sont souvent administrés qui gênent l'action bienfaisante de la nature qui s'efforce de remédier aux abus dont l'organisme a pâti, et le patient est expédié dans l'au-delà. MC2 503.1

Une mère qui a souffert d'une légère indisposition se serait remise avec un jeûne de quelques jours, un peu de repos et de tranquillité d'esprit; au lieu de cela, on fait appel au médecin. Lui qui devrait en savoir assez pour donner quelques simples conseils de modération dans le régime et indiquer à la patiente les directives à suivre, néglige de le faire, soit par ignorance, soit par cupidité. MC2 503.2

Il agit comme si le cas était grave, et administre des poisons qu'il se garderait d'absorber s'il était malade. L'état de la malade empire, des drogues empoisonnées sont administrées en plus grande quantité: vaincue, la nature abandonne la lutte, la mère meurt. Les drogues sont responsables. L'organisme a été empoisonné fatalement. C'est un véritable assassinat. Parents et voisins s'étonnent en pensant aux voies mystérieuses de la Providence qui a enlevé une mère au moment où elle était le plus nécessaire, où les enfants avaient un si grand besoin de ses soins. Ils accusent à tort notre bon et sage Père céleste en rejetant sur lui le poids du malheur humain. La volonté du ciel était que cette mère vive, et Dieu est déshonoré par cette mort prématurée. La maladie avait eu pour cause les mauvaises habitudes de la mère, et la négligence des lois de son être. Les poisons d'usage administrés par le médecin, introduits dans l'organisme, ont mis fin à son existence; elle laisse derrière elle un troupeau d'orphelins désolés et abandonnés. MC2 503.3

Les drogues prescrites par le médecin n'ont pas toujours un effet aussi fatal. Des malades qui absorbent ces drogues empoisonnées semblent aller mieux. Chez quelques-uns la nature dispose de forces vives suffisantes pour expulser le poison du corps et une période de repos amène la guérison. Ce n'est pas aux drogues qu'il faut en attribuer le mérite, car elles n'ont fait que gêner les efforts de la nature. Tout le bien est dû au fait que la nature possède des forces capables de rétablir la santé. MC2 504.1

Même dans le cas d'une guérison, le gros effort qui a permis à la nature d'éliminer le poison a endommagé la constitution et abrégé la vie du patient. Il en est qui ne sont pas tués par les drogues mais qui subsistent à l'état d'épaves, misérables, sombres et désespérés, un fardeau pour eux-mêmes et pour la société. MC2 504.2

Le mal ne serait pas si grand si ceux qui absorbent ces drogues étaient seuls à en souffrir. Les parents qui avalent ces drogues empoisonnées ne pèchent pas uniquement contre eux-mêmes; ils pèchent aussi contre leurs enfants. Un sang vicié, un poison distribué par tout l'organisme, une constitution brisée, et diverses maladies engendrées par le poison contenu dans la drogue, tout cela est transmis à la progéniture, legs misérable qui explique en partie la dégénérescence de la race. MC2 504.3

En administrant des drogues contenant des poisons les médecins ont largement contribué à déprécier la race physiquement, mentalement et moralement. Où qu'on aille, on voit des cas de difformité, de maladie et d'imbécillité qui résultent fréquemment de l'usage de drogues contenant des poisons, administrées par un médecin à titre de remède. Ce prétendu remède est pire que le mal qu'on a voulu combattre, car il entraîne de grandes souffrances pour le patient. Quiconque a un peu de bon sens devrait comprendre ce dont son organisme a besoin. Un sujet d'étude important pour les enfants devrait être la philosophie de la santé. Comprendre l'organisme humain est une chose indispensable, car alors une personne intelligente peut être son propre médecin. Si les gens savaient raisonner de cause à effet et se conformer à la lumière qui leur est accordée, ils suivraient une ligne de conduite leur assurant la santé et la mortalité en serait diminuée. Mais les gens préfèrent rester dans une ignorance coupable et se confier à un médecin sur lequel ils se déchargent de leur responsabilité personnelle. MC2 504.4

Plusieurs exemples m'ont été montrés qui servent à illustrer ce sujet important. Voici une famille composée d'un père et de sa fille. Celle-ci étant malade, le père vivement préoccupé fit appeler un médecin. En introduisant le médecin dans la chambre de la malade le père se montra très anxieux. Le médecin examina la malade et dit peu de chose. Tous deux sortirent de la chambre. Le père fit savoir au médecin qu'il avait enseveli la mère, un fils et une fille; cette fille-ci était tout ce qui lui restait de sa famille; très anxieux il demanda au médecin s'il jugeait que le cas de sa fille était désespéré. Le médecin voulut savoir la nature et la durée de la maladie de ceux qui étaient décédés. Le père relata tristement les faits touchant la maladie de ses bien-aimés. “Mon fils fut le premier à subir une attaque de la fièvre. Le médecin appelé se dit à même d'administrer une médecine capable de faire cesser la fièvre. Il administra une médecine très forte, mais dont l'effet fut décevant. La fièvre diminua, mais mon fils devint dangereusement malade. La même médecine lui fut encore donnée, sans qu'il y ait eu une amélioration. Alors le médecin eut recours à des remèdes encore plus puissants, sans que mon fils ait éprouvé un soulagement. La fièvre le quitta, mais loin de guérir il descendit rapidement la pente et mourut. Une mort aussi soudaine et inattendue nous porta un grand coup à tous, mais surtout à la mère. Son système nerveux fut ébranlé par ses veilles anxieuses et par le chagrin causé par cette mort soudaine et ce fut l'effondrement. Peu satisfait de ce qu'avait fait le médecin, ma confiance en lui ébranlée, je ne pouvais recourir à lui une seconde fois. J'en appelai donc un autre pour s'occuper de ma femme souffrante. Ce second médecin lui donna une bonne dose d'opium qui, disait-il, allait alléger ses douleurs, calmer ses nerfs et lui assurer le repos dont elle avait un si grand besoin. L'opium produisit un effet stupéfiant. Elle s'endormit et rien ne pouvait la réveiller de cet état de torpeur qui ressemblait à la mort. Son pouls et son cœur battaient parfois violemment puis faiblirent peu à peu jusqu'à ce qu'elle cessât de respirer. Elle mourut ainsi sans plus donner signe de vie et sans reconnaître les siens. Ce second décès, c'était plus que nous ne pouvions supporter. Nous étions tous profondément affligés; quant à moi je souffrais l'agonie et j'étais inconsolable. MC2 505.1

”Ensuite ce fut le tour de ma fille. Le chagrin, l'anxiété, les veilles l'avaient épuisée et jetée sur un lit de souffrance. Comme j'avais perdu confiance dans les deux médecins appelés, on me recommanda un autre médecin qui avait la réputation de bien soigner ses malades. Bien qu'il demeurât à une grande distance, j'étais décidé à obtenir ses services. MC2 506.1

”Ce troisième médecin déclara qu'il comprenait le cas de ma fille. Il la trouvait très affaiblie, le système nerveux détraqué; on pouvait faire cesser sa fièvre, mais il lui faudrait du temps pour se remettre. Il se disait parfaitement capable de la guérir. Il lui donna une forte médecine pour supprimer la fièvre. En ceci il réussit, mais, la fièvre disparue, le cas s'aggrava et donna lieu à des complications. Les symptômes ayant changé, des médecines variées furent essayées. Ces nouvelles médecines semblèrent d'abord lui donner un regain de vie et firent renaître nos espoirs, mais notre désappointement fut d'autant plus grand quand son état empira. MC2 506.2

”Pour finir le médecin recourut au calomel. Un moment elle sembla entre la vie et la mort. Ensuite elle eut des convulsions. Lorsque ces spasmes douloureux eurent cessé, on s'aperçut que malheureusement son intelligence faiblissait. Son état s'améliora lentement, bien qu'elle continuât à souffrir. Ses membres restaient paralysés sous l'effet des forts poisons qu'elle avait ingérés. Elle mourut dans une douloureuse agonie après avoir végété quelques années d'une manière pitoyable.” MC2 506.3

Ayant achevé ce triste récit le père jeta sur le médecin un regard suppliant, le conjurant de sauver le seul enfant qui lui restait. Le médecin parut triste et anxieux, mais ne fit aucune ordonnance. Il partit en disant qu'il reviendrait le lendemain. MC2 506.4

Ensuite une autre scène me fut présentée. Je me trouvai en présence d'une femme paraissant âgée d'environ trente ans. Un médecin qui se tenait à ses côtés affirmait que son système nerveux était détraqué, qu'un sang impur circulait paresseusement et que l'estomac était en mauvaise condition. Il promit des remèdes efficaces qui produiraient une amélioration. Il lui donna une poudre contenue dans un flacon portant cette étiquette: Noix vomique. J'observais quel serait l'effet sur la patiente. Cet effet sembla d'abord favorable. Son état s'améliora, elle reprit vie et sembla même heureuse et active. MC2 506.5

Ensuite mon attention fut attirée sur un autre cas. On me fit entrer dans une chambre de malade où un jeune homme souffrait d'une forte fièvre. Un médecin se tenait là avec une potion extraite d'un flacon portant ce mot: Calomel. Ce poison chimique ayant été administré, un changement sembla se produire, mais non pour le mieux. MC2 507.1

Un autre cas me fut encore présenté: celui d'une femme qui semblait beaucoup souffrir. Un médecin se tenait là et administrait une médecine extraite d'un flacon portant le mot Opium. Cela produisit d'abord un effet sur la malade, qui se mit à parler d'une manière étrange; ensuite elle se calma et s'endormit. MC2 507.2

Puis mon attention fut attirée sur le premier cas, celui de ce père qui avait perdu sa femme et deux de ses enfants. Le médecin se trouvait dans la chambre de la malade, près du lit. Une fois de plus il quitta la chambre sans mot dire. Quand le père revit le médecin il se montra fort ému et il demanda sur un ton impatient: “Ne voulez-vous rien faire? Laisserez-vous mourir la seule fille qui me reste?” Le médecin répondit: MC2 507.3

“J'ai écouté la triste histoire de la mort de votre femme bien-aimée et de vos deux enfants; j'ai appris de vos lèvres que tous trois sont morts en dépit des soins des médecins, après avoir absorbé les médecines prescrites. Les médecines n'ont pu sauver ceux que vous aimiez; en tant que médecin je crois sincèrement qu'aucun d'eux ne devait mourir. Ils auraient pu guérir si la nature n'avait pas été affaiblie par les drogues qui ont fini par l'anéantir.” Sur un ton décidé il dit au père anxieux: “Je ne puis donner une médecine à votre fille. Je me contenterai de faciliter les efforts de la nature en éliminant les obstacles de manière à permettre à la nature de récupérer les énergies épuisées de l'organisme.” Il plaça dans la main du père quelques instructions écrites, lui enjoignant de les suivre à la lettre. MC2 507.4

“Gardez la patiente dans le calme le plus complet en évitant tout ce qui pourrait la déprimer. Ceux qui l'entourent devraient se montrer gais et optimistes. Son régime doit être simple; il faut lui laisser boire autant d'eau fraîche qu'elle le désire. La baigner souvent dans de l'eau douce et pure, puis la frictionner gentiment. Laissez entrer autant d'air et de lumière que possible dans sa chambre. Qu'on la laisse se reposer dans une parfaite tranquillité.” MC2 507.5

Le père lut attentivement l'ordonnance et se demanda si les simples instructions contenues pourraient produire un effet quelconque. Le médecin lui dit: MC2 507.6

“Vous avez eu assez de confiance en mes capacités pour placer entre mes mains la vie de votre fille. Je verrai votre fille chaque jour et vous aiderai à la soigner. Suivez mes instructions en toute confiance; j'espère pouvoir vous la présenter d'ici quelques semaines en meilleur état de santé, sinon complètement rétablie.” MC2 508.1

Quoique triste et indécis le père se soumit aux décisions du médecin. Il craignait que sa fille vînt à mourir si on la privait de médecines. MC2 508.2

Ensuite le second cas me fut présenté à nouveau. La patiente semblait se trouver mieux à la suite de la noix vomique. Elle était assise, serrée dans un châle et se plaignant du froid. La chambre était remplie d'air impur, trop chaud et ayant perdu sa vitalité. Les moindres fissures avaient été bouchées pour éviter à la patiente de sentir le froid derrière le cou et le long de l'épine dorsale. Dès que l'on ouvrait la porte elle devenait nerveuse et angoissée et suppliait qu'on la ferme parce qu'elle avait froid. Elle ne pouvait supporter la moindre bouffée d'air venant de la porte ou des fenêtres. Un homme intelligent la considérait avec pitié et il s'adressa aux personnes présentes dans les termes suivants: MC2 508.3

“C'est ici le second résultat de la noix vomique. Ce sont surtout les nerfs qui en ressentent les effets, et c'est tout le système nerveux qui est affecté. Au premier abord l'action des nerfs sera stimulée, mais quand la drogue aura perdu sa force il y aura une sensation de froid et un épuisement. Autant l'effet aura d'abord semblé bienfaisant, autant il sera mortel par la suite.” MC2 508.4

Puis ce fut le troisième cas qui me fut présenté à nouveau. Il s'agissait du jeune homme auquel du calomel avait été administré. Il souffrait intensément; ses lèvres étaient noires et gonflées. Ses gencives étaient enflammées. Sa langue était pâteuse et enflée et une salive abondante coulait de sa bouche. L'homme intelligent déjà mentionné dévisagea tristement le malade et dit: MC2 508.5

“Voilà ce que produit cette préparation mercurielle. Il restait à ce jeune homme assez de force nerveuse pour résister victorieusement à cet intrus, et pour expulser de l'organisme cette drogue pleine de poison. Beaucoup d'autres n'ont pas assez de force vitale pour entreprendre la lutte; la nature accablée démissionne et la victime meurt.” MC2 508.6

Le quatrième cas, celui de la personne qui avait pris de l'opium, me fut présenté à nouveau. Elle s'était réveillée très abattue, l'esprit dérangé. Elle se montrait impatiente et irritable, Trouvant à redire à ses meilleurs amis, et s'imaginant qu'ils ne faisaient rien pour la soulager. Elle finit par devenir furieuse et maniaque. L'homme déjà mentionné la considéra tristement et dit aux personnes présentes: MC2 508.7

“C'est le second effet produit par l'opium.” Appelé, le médecin lui donna une plus forte dose d'opium, ce qui fit cesser le délire et la rendit loquace et gaie. Elle parut réconciliée avec son entourage et exprima une grande affection pour ses connaissances et ses parents. Mais elle ne tarda pas à devenir somnolente et à perdre ses sens. L'homme mentionné plus haut dit sur un ton solennel: MC2 509.1

“Son état n'est pas meilleur qu'au moment où elle délirait, bien au contraire. Ce poison, l'opium, apporte un soulagement momentané, mais ne supprime pas la cause du mal. Il a un effet stupéfiant sur le cerveau et l'empêche de recevoir les impressions provenant des nerfs. Pendant que le cerveau se trouve dans cet état d'insensibilité, l'ouïe, le goût et la vue sont atteints. Quand l'influence de l'opium se dissipe, le cerveau se remet à fonctionner et les nerfs qui n'avaient pu communiquer avec le cerveau poussent des cris de douleur plus forts que jamais en raison du dommage subi par l'organisme sous l'effet du poison. Tout poison supplémentaire donné au patient, qu'il s'agisse d'opium ou d'autre chose, ne fait que compliquer le cas et rendre la guérison plus difficile. Les stupéfiants administrés, quelle que soit leur nature, dérangent le système nerveux. Un mal simple au début, que la nature s'apprêtait à surmonter, ce qu'elle aurait réussi à faire si on l'avait laissée à elle-même, a été aggravé dix fois par la drogue empoisonnée introduite dans l'organisme. Ce poison a une action destructive, obligeant les forces vives à fournir un effort extraordinaire pour éliminer l'intrus.” MC2 509.2

Je fus introduite à nouveau dans la chambre de malade du premier cas, celui d'un père et de sa fille. La fille était assise à côté de son père, gaie et heureuse, resplendissante de santé. Le père la regardait avec satisfaction, le cœur débordant de gratitude de ce que lui eût été conservée la seule fille qui lui restait. Le médecin entra, eut une courte conversation avec le père et la fille, puis il dit, au moment de les quitter: MC2 509.3

“Je vous présente votre fille guérie. Je ne lui ai donné aucune médecine qui eût brisé sa constitution. Aucune médecine n'aurait eu le résultat que voici. La médecine dérange le mécanisme délicat de la nature, brise la constitution et tue au lieu de guérir. Seule la nature possède des pouvoirs curatifs. Elle est seule capable de rétablir ses énergies épuisées et de réparer le mal causé par la négligence de ses lois invariables.” MC2 509.4

Ensuite il demanda au père s'il approuvait le traitement effectué. L'heureux père exprima sa profonde et sincère gratitude et son entière satisfaction en ces termes: MC2 510.1

“Je viens d'apprendre une leçon inoubliable. Elle a été douloureuse mais profitable. Je suis maintenant convaincu qu'il n'était nullement nécessaire que ma femme et mes enfants meurent. Leurs vies ont été sacrifiées par les poisons administrés par les médecins.” MC2 510.2

Ensuite le second cas me fut montré, celui où la noix vomique avait été administrée. La malade ne pouvait aller de sa chaise au lit sans l'aide de deux personnes qui l'assistaient. Elle avait perdu presque entièrement l'usage de ses membres. Les nerfs de l'épine dorsale étaient partiellement paralysés et les membres inférieurs n'avaient plus la force de supporter le poids du corps. Elle toussait désespérément et respirait avec peine. On la déposa sur son lit; bientôt elle perdit l'ouïe et la vue, resta quelque temps languissante puis mourut. L'homme déjà mentionné jeta un regard attristé sur le cadavre et dit aux personnes présentes: MC2 510.3

“Vous êtes témoins de l'action lente et prolongée que la noix vomique exerce sur l'organisme humain. Au début elle provoque une action extraordinaire des forces nerveuses en vue d'éliminer la drogue empoisonnée. Puis c'est l'épuisement et pour finir la paralysie des nerfs. Tout le monde n'est pas affecté de la même manière par cette drogue. Il y a des constitutions assez fortes pour résister au mal infligé à l'organisme. D'autres, aux constitutions moins robustes, ne se remettent jamais après une seule dose, et une seule potion suffit à entraîner la mort. Les effets sont toujours délétères. La vie du patient dépend de l'état de sa constitution au moment où il reçoit le poison. La noix vomique peut endommager, paralyser et détruire la santé, jamais la rétablir.” MC2 510.4

Le troisième cas me fut de nouveau présenté, celui du jeune homme à qui du calomel avait été administré. Il était dans un état pitoyable. Ses membres étaient perclus et il était devenu difforme. Il déclara que ses souffrances étaient indescriptibles et que sa vie lui était à charge. L'homme si souvent mentionné le regarda avec une indicible pitié et dit: MC2 510.5

“Voilà l'effet du calomel. Il tourmente l'organisme aussi longtemps qu'il en reste la moindre parcelle. Il a la vie dure et il garde ses propriétés aussi longtemps qu'il subsiste dans l'organisme vivant. Il enflamme les jointure et amène souvent la carie des os. Il entraîne fréquemment des tumeurs, des ulcères, et même des cancers, longtemps après avoir été ingéré.” MC2 510.6

Le quatrième cas me fut présenté à nouveau: la patiente à qui de l'opium avait été administré. Son teint était livide, ses yeux inquiets et vitreux. Ses mains tremblaient, comme frappées de paralysie; elle paraissait très excitée, et elle s'imaginait que toutes les personnes présentes s'étaient liguées contre elle. Son esprit avait fait naufrage et elle délirait pitoyablement. Appelé, le médecin ne parut guère ému par ces terribles symptômes. Il donna à la patiente une plus forte dose d'opium, disant que cela remettrait les choses en ordre. Le délire ne cessa que lorsqu'elle fut complètement ivre. Ensuite elle sombra dans une stupeur qui avait toutes les apparences de la mort. L'homme mentionné promena un regard attristé sur la patiente et dit: MC2 511.1

“Ses jours sont comptés. Les efforts de la nature ont été si contrariés par le poison que les forces vitales ont été épuisées, la drogue empoisonnée ayant provoqué une activité anormale et répétée pour en libérer l'organisme. La nature est sur le point d'abandonner la lutte; alors la vie douloureuse de la patiente touchera à sa fin.” MC2 511.2

L'usage des drogues a entraîné plus de morts que toutes les autres causes réunies. S'il n'y avait dans le pays qu'un médecin là où il s'en trouve mille, une bonne partie de la mortalité prématurée serait évitée. Une multitude de médecins avec une multitude de drogues ont apporté une malédiction aux habitants de la terre et ont précipité prématurément dans la tombe des milliers et des dizaines de milliers de personnes. MC2 511.3

Manger trop fréquemment et en trop grande quantité a pour effet de surcharger les organes digestifs et de produire un état fébrile dans tout l'organisme. Le sang se charge d'impuretés et il s'ensuit diverses maladies. Un médecin est appelé, il prescrit quelque drogue qui amène un soulagement momentané, mais qui ne guérit pas. La maladie change d'aspect tandis que le mal réel est décuplé. La nature s'efforçait de son mieux à débarrasser l'organisme des impuretés qui s'y étaient accumulées; laissée à elle-même, avec les bienfaits du ciel, tels que l'air pur et l'eau pure, une cure rapide et sûre aurait eu lieu. MC2 511.4

Ceux qui sont affligés par la maladie peuvent faire pour eux-mêmes ce que d'autres ne peuvent pas faire aussi bien. Pour commencer, ils devraient soulager la nature du fardeau qui lui a été imposé. Il s'agit d'abord de faire disparaître la cause. Un court jeûne donnera à l'estomac l'occasion de se reposer. On réduira l'état fébrile de l'organisme par des applications d'eau soigneuses et intelligentes. Ainsi la nature sera aidée dans sa lutte pour débarrasser l'organisme de ses impuretés. Mais trop souvent les personnes qui éprouvent des douleurs s'impatientent. Elles refusent de faire preuve d'un peu de renoncement en supportant la faim pendant un moment. Elles ne sont pas davantage disposées à attendre que par un lent processus la nature ait reconstruit les énergies épuisées de l'organisme. Décidées à obtenir un soulagement immédiat, elles prennent les drogues puissantes prescrites par les médecins. La nature faisait bien son travail; elle aurait remporté la victoire si une substance étrangère n'avait introduit un poison. Quelle erreur! Maltraitée, la nature doit lutter à la fois contre deux ennemis au lieu d'un seul. Elle abandonne alors le travail commencé et s'attelle résolument à la tâche d'expulser l'intrus nouvellement introduit dans l'organisme. Cette double réquisition affaiblit la nature. MC2 511.5

Les drogues ne guérissent jamais la maladie: elles en modifient la forme et l'emplacement. Seule la nature est capable de guérir; laissée à elle-même, elle peut mieux accomplir sa tâche. Ce privilège lui est rarement accordé. Si la nature contrariée tient bon malgré tout et finit par accomplir en grande partie sa double tâche, permettant au patient de survivre, le crédit en est attribué au médecin. Si la nature échoue dans son effort pour expulser le poison de l'organisme, et que le patient meure, on y voit une mystérieuse dispensation de la Providence. Si le patient avait soulagé en temps voulu la nature accablée, et s'il avait su se servir d'une manière intelligente d'une eau pure et douce, cette dispensation de mortalité par la drogue eût pu être évitée. Mais l'emploi de l'eau n'a que peu d'effet si le patient ne comprend pas la nécessité de s'en tenir à un régime sévère. MC2 512.1

Nombreux sont ceux qui violent constamment les lois de la santé sans voir le rapport qui existe entre leurs habitudes quant à l'alimentation et au travail et leur santé. Ils ne commencent à se rendre compte de leur état qu'au moment où la nature abusée proteste par des maux et des douleurs de l'organisme. Si au moins les malades se mettaient à agir comme il faut, en recourant aux simples moyens qu'ils ont négligés, — l'emploi de l'eau et un régime approprié, — la nature recevrait l'aide qui lui est nécessaire et qu'elle eût dû recevoir déjà depuis longtemps. Par ce moyen le patient se rétablira généralement sans être débilité. MC2 512.2

Quand des drogues sont introduites dans l'organisme, elles paraissent d'abord produire un effet bienfaisant. Il y a un changement, sans que la maladie soit guérie. Celle-ci prendra une autre forme. L'effort de l'organisme pour expulser la drogue ne va pas sans d'intenses souffrances. Et si la maladie disparaît sous l'effet de la drogue, c'est pour réapparaître sous une forme nouvelle, maladies de la peau, ulcères, articulations douloureuses, ou parfois sous des formes encore plus dangereuses et même mortelles. Souvent le foie, le cœur, le cerveau sont affectés par la drogue et restent chargés d'infirmités; si les malheureux sujets survivent, les voilà invalides pour le reste de leurs jours, traînant une existence misérable. La drogue empoisonnée coûte décidément trop. Si elle n'a pas coûté la vie, elle a coûté davantage. Les efforts de la nature ont été paralysés. Tout le mécanisme est dérangé; le jour où l'on demandera à ces organes délicats endommagés de collaborer avec les autres organes, ils ne seront pas assez forts pour accomplir leur tâche et l'organisme tout entier se ressentira de cette faiblesse. Le sang se charge d'impuretés quand ces organes sont affaiblis au lieu d'être conservés dans une condition normale. La nature poursuit son effort, le patient souffre d'indispositions variées jusqu'au moment où elle s'effondre, entraînant la mort. MC2 512.3

Bien des vies ont été sacrifiées parce que des médecins ont administré des drogues pour des maladies inconnues. Ils ne savaient pas exactement de quelle maladie le patient était affligé. On s'attend que les médecins sachent de suite que faire; s'ils n'agissent pas immédiatement comme ayant compris parfaitement le cas, le malade et son entourage impatient les jugent incompétents. Pour rendre hommage aux opinions erronées du malade et de ses proches il faut donc administrer des médecines, faire des essais en vue de guérir le patient d'un mal dont on ignore la nature. Le corps se trouve chargé de drogues empoisonnées que la nature ne parvient pas à expulser. Il arrive que des médecins s'aperçoivent d'avoir employé de puissantes médecines pour une maladie absente, et la mort s'en est suivie. MC2 513.1

Les médecins ne sont pas seuls à blâmer. Si les malades voulaient faire preuve de patience, se mettre à la diète et accepter de souffrir un peu, donnant à la nature le temps d'agir, ils se rétabliraient bien plus vite sans avoir recours à une médecine quelconque. Seule la nature possède des pouvoirs curatifs. Les médecines sont incapables de guérir; en général elles ne font que gêner les efforts de la nature. C'est elle, après tout, qui doit effectuer la guérison. Le malade est pressé de guérir et ses proches sont impatients. Il leur faut des médecines; s'ils n'en ressentent pas les effets, leurs fausses conceptions les font changer de médecin sans plus attendre. Souvent ceci ne fait qu'empirer le mal. On fait l'essai de médecines plus dangereuses et plus meurtrières que les précédentes, vu que les deux traitements se contrarient et l'organisme est irrémédiablement envahi par des poisons. MC2 513.2

Beaucoup n'ont jamais éprouvé les effets bénéfiques de l'eau et craignent d'employer l'un des plus grands bienfaits du ciel. On a refusé de l'eau à des personnes atteintes de fièvres brûlantes, de peur de leur faire du mal. Si on leur avait permis de boire à satiété, en ajoutant des applications externes, on aurait évité des jours et des nuits d'inutiles souffrances et des vies précieuses eussent été épargnées. Des milliers de personnes ont été dévorées par la fièvre jusqu'à ce que le combustible qui l'alimentait ait été consumé, en même temps que les forces vitales; ces personnes sont mortes dans une agonie atroce, sans qu'on leur ait permis d'apaiser leur soif ardente. On permet à l'eau de sauver de la rage du feu des bâtiments insensibles, et l'on refuse à des êtres humains ce qui éteindrait le feu qui consume leur vitalité. MC2 514.1

Des multitudes maintiennent une ignorance inexcusable concernant les lois de leur être. Ils se demandent pourquoi la race est si faible, pourquoi il y a tant de morts prématurées; n'y a-t-il pas une cause à cela? Des médecins qui font profession de connaître l'organisme humain prescrivent à leurs patients, voire à leurs chers enfants et aux compagnons de ceux-ci, des poisons lents pour arrêter la maladie ou soigner de légères indispositions. Ils n'agiraient pas ainsi s'ils savaient le mal que font ces choses. Alors même que les effets du poison ne sont pas perceptibles sur le moment, il ne manque pas d'agir sur l'organisme, minant la constitution et s'opposant aux efforts de la nature. Pour corriger un mal on en provoque un plus grand, souvent incurable. Ceux qui sont traités de cette manière sont constamment malades et prennent constamment des médicaments. Malgré cela, si vous écoutez leurs conversations, vous les entendrez chanter les louanges des drogues dont ils se servent et les recommander à d'autres, comme si elles leur avait fait du bien. Il semble que pour une personne sachant raisonner de cause à effet, il devrait suffire du teint blême, des lamentations continuelles et de l'épuisement général pour déceler l'influence destructrice des drogues sur la santé. Toutefois plusieurs sont si aveuglés qu'ils ne voient pas que non seulement les drogues ne les ont pas guéris mais qu'elles ont empiré leur état. Les malades de la drogue sont nombreux dans le monde, grincheux, irritables, toujours maladifs, menant une existence misérable, paraissant ne vivre que pour exercer la patience d'autrui. Les drogues empoisonnées ne les ont pas tués sur l'instant, car la nature est lente à se dessaisir de la vie. Elle n'abandonne pas facilement la lutte, mais ces personnes adonnées à la drogue ne sont jamais en bonne santé. MC2 514.2

Les médecines infiniment variées qui sont sur le marché, pour lesquelles on fait une publicité tapageuse, annonçant ces drogues nouvelles comme capables de cures merveilleuses, tuent des centaines de malades pour un qu'elles guérissent. Les malades manquent de patience. Ils sont prêts à prendre n'importe quelle médecine, même très puissante, sans rien connaître de la nature de cette potion. Toutes les médecines qu'ils absorbent rendent la guérison plus difficile. Ce qui ne les empêche pas de persister à se doser; leur état empire sans cesse et ils meurent finalement. Il en est qui veulent de ces médecines à tout prix. Qu'ils prennent ces mélanges nocifs et ces poisons mortels variés sur leur propre responsabilité. Les serviteurs de Dieu ne devraient pas administrer des médecines sachant qu'elles laisseront derrière elles des effets nuisibles sur l'organisme, même si elles apportent un soulagement momentané. — How to Live, 192. MC2 515.1